Milles et une couleur sont disposées à même le sol alors que les premiers curieux de la journée affluent vers le marché noir. C’est souvent la même chose ; aux premiers rayons de soleil, les étales se déploient, les marchandises sortent des chariots pour venir répondre aux attentes des plus pressés. Généralement, ces clients-là savent pourquoi ils sont là. Ils n’hésitent pas longuement avant de se lancer d’un pas décidé vers l’un des produits.

C’est avec ce genre de client que Leonas a l’habitude de négocier. Oh, il y en a bien certains qui viennent pour la première fois se fournir dans la meilleure échoppe du marché noir (en toute modestie) ; mais sont plus rares. Plus hésitants aussi, ils ont besoin d’un guide pour les encourager à passer à l’acte.
Et pourtant, il n’y a pas que des produits interdits ou dangereux qui se déploient sous leurs yeux. Non, le marché noir c’est aussi l’un des centres névralgique d’Althea. Un rassemblement de mille merveilles, aussi rares que communes ; les étoffes de la vallée côtoient les minéraux précieux de Célestia. Le liquide mortel de Jiminy défie les délices d’une vie de Caer. Une concentration unique des meilleurs produits du continent.

Les heures passent, Leonas empoche, discute et rie au rythme des passages ; s’enrichissant secrètement de chaque négociation dans ses habits de paysans. La danse est routinière, mais le marchand se complait dans cette cadence rassurante. Entre habitués et premières fois, il choie ses clients ; il ne faudrait pas qu’ils aillent voir la concurrence n’est-ce-pas ?
A la suite d’une transaction rondement menée, Leonas laisse son étale pour aller à la rencontre de dreadlocks qui tranchent la foule. Si ce n’était pas ce bon Noam !
« Noam ! Vient là, raconte-moi tes dernières aventures, le peuple a besoin de savoir. »
Déjà, Leonas a enfilé son bras sur les épaules de l’aventurier, le traînant vers son échoppe ; le berger continue toujours de veiller sur son troupeau de merveilles, même quand il n’est plus là.

« Tu as affronté l’éternelle tempête ? Ou alors les dangereux sabliers ? Non, je sais, laisse-moi deviner ! Tu as plongé dans le lac aux étoiles après les misères que le père Lewis nous a fait subir ? Oh ça ne m’étonnerait pas de toi mon bon Noam. »

Flot de parole ininterrompue qui vous fait mal à la tête, Leonas ne fait que parler, parler et encore parler. Il aime les histoires. Il aime l’aventure. Et il aime encore plus suivre les histoires de Noam l’explorateur pour mieux les raconter ensuite. Fan de Noam ? Peut-être un peu. Il admire ces gens qui ont du courage quand lui n’en a aucun.