Accepter un stage pour m'employer plus rapidement dans le monde du travail, je n'avais le temps, je n'avais pas le droit aux failles. La statue de givre savait abattre sa froideur, ses mots, sa rigueur... Je sentais dans la journée cette pression, pourtant je n'avais pas d'autres choix que de m'accrocher, de créer un peu de détermination. Je me sentais tendue, pourtant cette femme était si belle, mais je n'avais jamais le temps de détendre ma vue. Je n'avais jamais le temps de me détendre, je n'avais pas l'occasion de me défendre. Il n'y avait pas moyen de se détendre. J'étais sous l'emprise d'une magnifique harpie, moi petit moineau, Pourtant, grâce à elle, je ne sombrais jamais dans l'ennuie. D'expérience et d'aventures, j'étais comblée. Pourtant, ce sentiment d'imperfection me prenait la poitrine, j'étais frustrée. Alors que je finissais de rédiger, la blonde fit claquer le carnet, me laissant sortir de mon écrit. Je levais les yeux jusqu'à son air glacial, sortant du marécage de mot dans lequel je m'enfonçais. Lors de nos journées ensemble, c'était d'un banal... Mon œillade la fixait, tandis que je ne parlais, laissant pénétrer les paroles de mon aînée.

- Oui madame.

J'étais enfermée dans cette cage de glace et de plaisir il était dur se délecter. Je ne m'accordais pas de soupir, j'étais fatiguée. Pourtant, je ne voulais décevoir la reine de glace, puisque des occasions comme celles-ci ne m'avaient jamais été données. Je posais mon stylo et commençait à ranger, m'éclipser, m'évaporer. Cependant, la soirée n'était pas terminée . La blonde me laissait le choix, mais je ne devais pas refuser. Encore une fois, je suivais le courant pour me laisser emporter, suivant les propositions, ne tentant pas même d'écouter mes volontés.

- Si vous me le permettez, je veux bien rester. J'ai encore à apprendre, et c'est en utilisant mon pouvoir qu'il va évoluer, au mieux. A vos côtés, je suis sûre d'apprendre plus rapidement à me maîtriser.

Je voyais sur ce visage, un étrange présage. Habituellement gelé, je découvrais une mimique que de mes yeux je n'avais eu le temps d'explorer. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait, mais je restais ferme, à me contrôler, à gérer cette tempête qui battait en moi, qui me criait de continuer, ne pas laisser tomber. Je baissais les yeux, n'osant affronter son regard, de réflexe malheureux. Je sentais déjà le feu dans ma tête à l'idée d'utiliser cette magie.

Comme les goûtes de pluie, je me laissais perdre petit par la grandiose, par la froide Sasha. Elle me  voulait grêle et me formatait, modulable, sans aucun tracas. Je n'avais pour autant l'envie de résister, je me laissais aller, mais je ne comprenais. Pourquoi cette femme au cœur d'ivoire cherchait autant l'imperfection, puisque c'est ce qui forme la beauté, la différence, l 'authenticité.

La porte se fermait sur nous, pour ne laisser que la blancheur des dossiers sur lesquels nous passions la journée. Encore un claquement, mais cette fois-ci je me résignais. Un regard froid, intense, porté, prête à parcourrir la magie qui m'était offerte, comme un cadeau, comme un nivers secondaire, si différent de là-haut. Je pressais mes deux mains à présent, n'attendant pas plus longtemps. Il était temps de se concentrer sur le présent, de montrer le potentiel. Je n'étais pas assez forte, comparé à cette femme qui semblait combattante, qui avait l'esprit plus fort.

Je savais que je n'avais peu de temps alors je m'offusquais d'ordonner à une petite cuillère de se lever, ce fut le cas pour quelques morceaux de sucres qui se trouvaient non loin de là. Et tandis que les objets agissaient, que je ne les quittais des yeux à ma proximité, j'étais envahie d'une étrange aura. Un violet m'entourait, me consolait, me prenait entièrement, faisant légèrement voler mes cheveux, comme s'il y avait le vent.

- Voyons cela.

Une de mes mains se leva, tandis que j'effectuais un mouvement avec les doigts pour souligner ma volonté : faire en sorte que la cuillère cède à ce que je lui demandais. Cependant, c'était compliqué. Je la sentais résister, peu importe la matière, je me trouvais à grimacer. Tandis que l'objet tendait vers ce que je désirais, pour que je le fasse retomber, à la moindre fatigue, à la moindre émotion de trop. J'avais réussi, mais me laissant emporter par cet accès de confiance, pourtant je ne devais laisser tomber, pas cette fois. Alors je recommençais, mais les minutes n'étaient pas encore terminées, passées. De nouveau, l'objet se mit à voler. Il fallait que je lui rendre sa forme initiale... Si je le pouvais. C'était bien plus compliqué.

- Je vais lui rendre sa forme initiale.

Un compliment de la part de Sasha, ce n'était pas rien. La blonde en avait du chemin et la voir se délecter du spectacle me poussait à continuer. Je n'osais pas pour autant quitter les objets des yeux une seconde, puisque je savais que l'expérience ne serait plus féconde. Je ne briserai pas le sort, même si la blonde tentait de m'entraver, de piéger chacun de mes efforts. De plus, le temps de l'utilisation n'allait pas tarder à être écouler. Je ne devais pas risquer de froisser le matériel avec lequel je jouais.

Elle continuait de parler et la grimace revenait sur mon visage. Distrayante, elle ne me facilitait en rien ma concentration que je n'arrivais pas à garder en cage. Je gardais sur mon visage une expression forte, comme de la rage. De mon nez, venait doucement s'écouler la couleur rouge.. Pourtant, je n'y faisais pas même attention, puisque tordre la cuillère me poussait à une interne ébullition. Le métal se tordait dans le sens inverse tandis que les petits morceaux de sucre cédaient   à la pression et retombaient presque sur la surface. Puis tout retomba brusquement, d'un coup sans que je ne puisse y changer quelque chose. La blonde l'avait faite perdre du temps. L'aura qui était autour de moi disparu et mes cheveux autrefois comme des serpents retombèrent sur mes épaules joliment.

Je n'avais pas réussi à aller jusqu'au bout puisque la cuillère restait encore un peu tordue, je pouvais voir  encore cet aspect légèrement dodu. L'une de mes mains passaient sur mon visage pour chercher la moindre trace de migraine, la moindre blessure, mais tout ce qui pouvait me faire tourner de l’œil était le liquide qui venait se glisser sur le bout de mes doigts. Malencontreusement je posais mes yeux bleus dans ceux de Sasha, attendant déjà la critique désapprobatrice de mon aînée, de la grande aux airs de chat.

- Auriez-vous un mouchoir ?... L'environnement n'était pas avec moi. Ce n'est pas une mauvaise chose, en soi. Il faut que je m’entraîne à rester aussi concentrée, peu importe ce qui m'entoure. C'est le plus dur, pour moi.

Je n'osais plus regarder mes doigts, attendant pour le supplice de ma maîtresse de choix.