Tu ne sais que penser de tout ça. Tu es officiellement une ennemie de Valentine, après l’avoir dévoilée, non ? Et pourtant, tu peux vivre ta vie tranquillement, sans aucune menace et sans rien qui ne te tombe dessus. Évidemment, ça ne change absolument rien au fait que tu n’es aucunement sereine. Étrangement, manquer de croiser Valentine n’a jamais été aussi stressant de toute ta vie. À une époque, quand tu croyais encore qu’elle était bien Victoire, tu souhaitais plus que tout la croiser. Désormais… Elle n’est plus.

Mais encore une fois, tu secoues la tête. Tu n’es pas là pour penser à tout ça, voyons. Arrête de te prendre la tête. Essaie simplement de te détendre. Cette histoire de Maître des Rêves, un gros manque de respect envers le Père Lewis et une attaque presque directe… Et cette fameuse tablette qui ne servait à rien… Tout ça n’était rien d’autre qu’un rêve, après tout. Et pourtant, ces blessures causées par ces femmes sont encore présentes.

Tu soupires longuement, grognant, alors que tu viens plonger le seau dans l’oasis en face de toi. Un peu d’eau te fera du bien, sous cette chaleur éclatante et menaçante du Désert. C’est encore pire maintenant… Tu détestes ça. La tendresse de la Vallée te manque presque. Et Magnolia, Rachel… Elles te manquent. Elles étaient devenue ton quotidien, après cette fuite temporaire du Désert.

Tu te redresses pour marcher, faire quelques pas. Mais finalement, c’est te faisant bousculer que tu tombes sur le sol, secouant la tête.

« H-Hey… ! » Un peu secouée, tu finis par te redresser, et hausses un sourcil en voyant la personne. Définitivement quelqu’un qui ne vient pas du Désert, si tu devais le penser. Tu souris cependant tendrement. Une enfant qui fuit, visiblement. Tes mains se viennent se poser sur tes hanches alors que tu la regardes.

« Tu pourrais faire attention ! » Et pourtant, tu n’as pas l’air dure. Au contraire, juste amusée.

Amusée de pouvoir enfin penser à autre chose. Car oui, tu es à ce point désespérée.

Désespérée au point de saisir n’importe quelle occasion pour penser à autre chose qu’au visage de Victoire.

Nina délaisse une nouvelle fois sa classe qui écoute une femme ennuyante expliquer les risques auxquels les Oubliés sont sujets quand ils gardent l'oasis la nuit. Elle n'en a que faire d'écouter une adulte blasée leur expliquer quels fruits et quels légumes ils font pousser ici. Vous n'êtes tout de même plus des gamins.

Alors à pas de loups elle s'enfuit sans regards en arrière. Elle s'est déjà faite disputer plusieurs fois mais ça ne l'empêche pas de recommencer encore et encore en inventant de fausses excuses que les adultes gobent en regardant ses yeux larmoyants. Elle est rusée la petite, rusée et sournoise. Mais perdue dans ses pensées, elle n'a pas fait attention où elle posait ses pieds et la voilà qui bouscule quelqu'un. Elle se retourne et hausse un sourcil quand la brune lui demande de faire attention. Elle n'a pas vraiment l'habitude qu'on lui dise quoi faire et ça a plutôt tendance à la mettre de mauvaise humeur.

« Oh mes excuses, je ne t'avais pas vue, tu te fonds tellement dans le décors ! »

Elle lui rend un sourire adorable qui creuse la petite fossette dans sa joue qui la rend encore plus craquante. On ne sait jamais si ce qu'elle dit est méchant et bien visé ou tout simplement une phrase innocente et un peu maladroite.

« Toi aussi tu travailles à l'Oasis ? »

Nina fait référence à la dame qu'elle a quitté il y a peu et qui expliquait les difficultés de la vie à l'Oasis, montrant de sa main le seau que la jeune fille remplissait. Même si elle trouve que c'est exagéré, ce n'est pas vraiment un travail de passer sa journée à arroser des plantes ou à les récolter. Et puis ce n'est pas si fatiguant de passer sa journée dehors franchement.

Au début, tu bloques. Tu bloques sur ce sourire qui t’hypnotise. Quelle idée d’adresser un sourire aussi adorable et mignon à une personne en manque d’amour telle que toi ? Tu ne sais pas trop, mais par réflexe – et probablement par mimétisme – tu t’efforces de sourire d’une manière adorable aussi. Peut-être pour le lui rendre. Puis finalement tu te ressaisis, le sourire agréable forcé devenant presque un véritable sourire. Ne remarquant presque pas la remarque sur le fait que tu es invisible, tu t’arranges simplement pour replacer correctement ta tenue, après être tombée.

Mais sa question te fait hausser un sourcil. Probablement est-ce par rapport au fait que tu portes encore ce seau… Seau simplement utilisé pour récupérer un peu d’eau pour toi, en vérité. D’ailleurs… À cause d’elle, tout le seau s’est renversé, et l’eau coule à vos pieds. Tu ris délicatement, d’une manière gênée.

« Haha… Non, je ne travaille pas ici. Je voulais juste récupérer un peu d’eau pour chez moi. Mais on dirait qu’il va falloir que j’en récupère encore. » Pas une reproche, mais bien une petite parole drôle. Parce que oui, ça te fait un peu rire, bien que gaspiller l’eau sous cette chaleur de plomb… Tu secoues finalement la tête.

Tes yeux l’observent de haut en bas. Tu souris tendrement avant de redresser les yeux vers son visage, bien que ne parvenant pas à la fixer dans les yeux. Tu n’arrives que rarement à regarder les gens directement dans les yeux, tu as toujours cette petite peur, cette petite angoisse qui te pousse à détourner le regard. Qui t’empêche d’observer les gens dans les yeux. Qui t’empêche toujours de les regarder.

Finalement, tu ris un peu nerveusement.

« Sinon… Comment tu t’appelles ? » Il y a clairement mieux comme manière de débuter une conversation. Mais tu es si gênée, Carmen. Si gênée et si calme. Tu n’as pas l’habitude de parler et de vouloir attirer l’attention des gens. Ou plutôt, tu n’as pas l’habitude de faire quelque chose pour effectivement attirer l’attention des gens.

D’habitude, tu la veux simplement. Tu ne fais rien pour l’avoir.

Elle hausse légèrement un sourcil de surprise en la voyant l'observer de haut en bas. Mais elle lui pardonne facilement, il faut dire que Nina est un joli brin de fille alors parfois les yeux se font un peu trop osés, un peu trop observateur. Mais ça ne la dérange pas, elle sait l'effet que ses deux petites fossettes font quand elle tend son sourire d'ange. Une fois encore il faut croire qu'elle a frappé, la brune ne la regarde plus dans les yeux, ce qui rend Nina fière d'elle. La petite peste se penche en avant pour la regarder faire, n'ayant même pas l'idée de l'aider. Les basses besognes ne sont pas pour elle.

« Nina. Et toi ? »

Les cheveux lui chatouillent les joues, elle se sent mieux ici à l'ombre des arbres. L'air chaud du désert ne lui va pas au teint, elle transpire à longueur de journée et arrivée au soir on dirait les froids polaires de Polaris.

Elle recule un peu pour ne pas marcher dans l'eau et s'assoit un peu plus loin, l'air érinté. Comme si elle avait travaillé toute une journée sans s'arrêter. Il faut dire que la petite peste n'a pas l'habitude de marcher longtemps, surtout sous un soleil pareil. Elle jette un coup d’œil à l'autre fille et penche la tête, songeuse.

« Tu vas chercher ton eau toute seule ? Ce serait plus simple si tu demandais à quelqu'un de le faire non ? »

Ah Nina et ses problèmes de riche ... Il y a quelques années elle n'aurait même pas compris que des gens puissent travailler pour vivre. A présent elle doit faire sa lessive toute seule, quand personne ne veut le faire pour elle. Et elle déteste faire ce que les gens normaux font. Nina est une princesse obligée de vivre parmi le bas peuple.

Te redressant, tu viens passer une main dans tes cheveux tandis que tes yeux reviennent doucement se poser sur son visage. Il n’y a pas faute, elle reste un joli brin de fille. Son nom est prononcé, et tu penches la tête sur le côté. Elle, s’est penchée en arrière le temps que tu ne te redresses et Nina n’a même pas songé à t’aider. Époussetant tes vêtements, tu viens finalement lier tes doigts entre eux, les bras tendus.

« Carmen. »

Petite fille perdue dans le Désert. Tu souris à la fille en face de toi, sans réussir à faire disparaître cette petite gêne contenue dans ton coeur. Rarement tu ne parviens à parler directement aux gens, habituellement. Encore moins quand ils en viennent à te bousculer au tout début.

Tu la suis du regard, venant s’asseoir un peu plus loin à l’ombre, et tu penches à nouveau la tête sur le côté. Elle semble si éreintée. A-t-elle beaucoup marché, aujourd’hui ? Tu redresses la tête pour observer le ciel, au travers des feuilles des arbres au dessus de vous deux. Tu passes une main sur ton front pour essuyer les quelques gouttes de sueur qui y perlent, avant de sourire finalement, retournant ton regard sur elle.

« Si je peux le faire, alors pourquoi demander à quelqu’un d’autre ? » Tu ne comprends pas réellement l’idée de demander ce que tu peux faire toi-même à quelqu’un. « Quelle utilité j’aurais à demander aux autres ? » Lentement, tu viens marcher vers elle, restant cependant debout en face d’elle.

Nina grimace en regardant le sable. Elle n'aime décidément pas ce lieu trop salissant. La neige ça mouille mais au moins ça ne se faufile pas partout. Quelle plaie de se laver les cheveux avec tout ce sable et qu'est-ce que ça gratte. Nina soupire et regarde l'autre fille en haussant un sourcil.

« T'aimes te fatiguer pour rien toi ? »

Elle ne comprend pas vraiment mais la fleur hausse les épaules, fataliste. Les autres sont toujours si compliqués et étranges. Ils larrivent toujours à la surprendre.

« Tu comptes me regarder de haut encore longtemps ? »

Elle croise les jambes et passe une main dans ses cheveux, un sourire en coin. Nina a trouvé une cible, elle ne paraît pas bien maligne.

« Carmen donc ... Tu veux pas m'en passer un peu ? J'ai très soif. »

Elle lui offre son plus joli sourire, la petite diablesse cache son vrai visage derrière sa beauté atypique.

Toi non plus, tu ne comprends pas réellement la manière de penser de la jeune femme qui se tient face à toi. Après avoir ramassé ton seau, tu fronces les sourcils quelques instants. Pense-t-elle réellement qu’utiliser les gens est mieux que de faire les choses par soi-même ? Quel genre d’enfance a-t-elle eue, au juste ? Tu soupires doucement.

« On n’est jamais mieux servis que par soi-même. C’est ce qu’on me répétait toujours. » Et jamais tu n’as voulu te servir des autres pour avoir ce que tu voulais. Souriant faiblement, tu laisses un petit ricanement amusé échapper quand elle te demande.

« Tu n’aimes pas qu’on te regarde de haut ? »

Ça t’amuse, de voir ce genre de personnes. Et tu hausses les épaules, attendant à nouveau quelques instants. La voir agir est probablement amusant – et adorable, tu ne le nieras pas. Tu soupires doucement.

« Te passer de l’eau ? »

Tu penches la tête sur le côté, regardant derrière toi avec un sourire.

« D’accord. » Et alors que tu en récupères un peu pour elle, tu restes à distance raisonnable avant de la lui tendre.

« Tiens. Tu peux te lever pour la récupérer, non ? » Petit sourire amical. Tu es loin d’être très intelligente, mais malicieuse, peut-être.

Nina soupire, mais il faut avouer qu'elle aime bien quand les autres ont du répondant. Elle fait semblant d'être touchée par ses mots, relevant la tête puis la tournant avec fermeté pour ne plus croiser son regard. Et puis elle jette un coup d'œil discret pour la regarder récupérer de l'eau avant de détourner les yeux pour ne pas se faire voir.

« Mmmh ? »

Comme si elle n'était pas intéressée elle tourne la tête tranquillement vers Carmen.

« Voyons Carmen ... Ne vois-tu pas que je suis extenuée ? »

Elle aussi retrouve son sourire, cette fois il est amusé. Elle prend tout son temps, se redresse et se lève pour essuyer ses fesses de tout ce sable. Elle prend le temps de regarder autour d'elle, sourire aux lèvres puis enfin elle vient boire au seau de la jeune femme en se baissant un peu.

« Voilà, comme ça tu peux le garder et je n'ai pas eu à le tenir. »

Elle rit un peu et passe ses mains dans son dos, un air de diablotin flottant sur ses pommettes roses.

« Oh non, oups ! »

Elle joue la maladroite, son épaule vient cogner un peu trop fort contre celle de Carmen et le seau termine sur les pieds de la brune. Nina elle, a eu le temps de sauter en arrière pour ne pas être éclaboussée. Elle a posé sa main sur sa bouche dans un air mi-surpris, mi-amusé. Ah pour ça, elle n'est pas du tout désolée.

Elle a véritablement l’air d’une enfant, à tes yeux. Mais elle est amusante, n’est-ce pas ? Jouant avec toi, et pourtant. Tu es amusée par ses actions, par la manière dont elle agit. Après avoir rempli le seau d’eau, tu reviens vers elle pour le lui tendre. Et elle se lève – miracle – pour directement boire dans le seau, te faisant comprendre qu’elle ne le tiendrait pas. Tu soupires doucement, tout de même riant de cette fille.

« Tu es incroyable. »

C’est quand elle se redresse et vient taper contre ton épaule que tes jambes tremblent un peu, et que tu fais tomber le seau sur tes pieds. Essayant de le ramasser, maladroitement, tu n’y parviens pas et tes pieds se retrouvent alors trempés. Tu soupires doucement, avant de relever la tête vers elle.

« Tu aurais pu faire attention ! »

Voix un peu plus dure que la première fois, mais avec un air tout de même amusé. Tu te redresses et vérifies s’il y a encore un peu d’eau dans le seau, avant de soupirer.

« Mais ne t’en fais pas. Pour te racheter de ta maladresse… Tu vas pouvoir aller remplir le seau à ton tour. »

Et tu le lui tends, avec un sourire amusé.

Nina garde sa main sur sa bouche, elle a l'air si vrai, tellement désolée. Comme elle joue bien la comédie, quelle petite peste adorable. La jeune fille hausse les épaules et regarde la catastrophe, la bouche de côté.

« C'était plutôt à toi de faire attention voyons ... C'est toi qui tenait le seau, pas moi ... »

Elle prend son air tout triste, les larmes au bord des yeux et regarde Carmen.

« Et maintenant c'est à moi de réparer tes erreurs ? Est-ce que j'ai l'air d'être quelqu'un qui mérite ça ? »

Elle essuie une larme imaginaire et lui tourne le dos en reniflant. Oh regarde petite Carmen, comme tu as blessé la si gentille Nina.

Ou pas.

Nina prend le seau avec vivacité et l'envoie au loin dans l'eau avec un grand éclat de rire.

« Oh regarde comme je l'ai jeté loin ! »

Elle éclate de nouveau d'un rire joyeux, pas joué celui-là pour une fois. Nina est très fière d'avoir envoyé le seau en plein milieu de l'oasis, elle le regarde flotter en riant et prend la main de Carmen.

« Je crois qu'on va être obligé d'aller le chercher. On va être toutes mouillées ! »

Nouveau rire alors qu'elle pointe sa jolie farce. Oh non Nina n'ira pas chercher le seau, il faudrait mouiller ses beaux vêtements pour ça. Et Nina est une princesse, Nina est la reine de son petit monde.