C’était peut-être tôt pour quitter la Vallée, trop tôt, toi qui commençais tout juste à découvrir cet endroit qui était ton nouveau chez toi, toutefois, ce n’était pas ça qui allait t’arrêter de découvrir ce monde dans lequel tu étais atterrie. Ce vaste monde aux décors surprenants qui se trouvait, à tes yeux, partout et nul part à la fois. Où étais-tu réellement ? Tu n’en avais aucune idée. Sous la surface de ce que certains avaient dit au travers cette histoire un peu folle de certains ayant tenté de remonter en suivant un imposant escalier. Pourquoi remonter ? Pourquoi vouloir aller là-haut ? Ça aussi tu l’as compris, au détour de conversations, que pour ceux étant arrivés ici il y a de cela quelques années déjà, nul n’avait su jusqu’à dernièrement ce qu’il se passait réellement, là-haut. Les monstres. La désolation. Une réalité qui t’avait ébranlé et qui semblait cependant ne plus trop t’affecter, maintenant que tu été ici. Oh, on t’avait parlé de transcendés (le nom de ces monstres) mais, de ce que tu avais compris, ces derniers se trouvaient surtout dans le désert donc, tant que tu n’y mettais pas les pieds, ça devrait aller.

Puis, tant mieux parce que ce n’était pas vers le désert que tu voyageais. Non. Tu te trouvais à l’entrée du dôme recouvrant Polaris, passant sans trop de problème en souriant à celui observant ton visa. Une fois le processus administratif passé, tu pouvais enfin voir tout ce qui se cachait derrière ce dôme et ce fut donc un regard émerveillé que tu vins poser sur tout ce qui se dessinait sous tes yeux. Les grands bâtiments. La lumière du soleil. C’était surtout ça, en fait. Le soleil. Ce que tu n’avais pas trop la chance d’apprécier à Requiem. Peut-être aurais-tu dû accepter l’offre de Polaris ? Il était trop tard pour ça de toute façon. Puis, tu pouvais voyager, tu pouvais apprécier ces nouveaux décors et ces plaines enneigées à l’extérieur du dôme donc, au final, ce n’était pas plus mal.

Le pas léger, voilà que tu es dans la ville, holokit à la main pour prendre des photos de tout et n’importe quoi comme la parfaite touriste que tu es. Jusqu’à ce que ton regard s’accroche sur un visage que tu crois reconnaître. Il apparaît sur la photo que tu viens tout juste de prendre et, descendant ton holokit, tu poses un regard perçant sur lui n’ayant rien de subtile. Un regard long et pesant jusqu’à ce que tu te décides de t’approcher de lui, la démarche confiante et les sourcils légèrement froncés. Est-ce bien lui ? C’est peut-être ta mémoire qui te fait défaut. C’est peut-être les années qui ont altéré tes souvenirs. T’en sais trop rien. Non, tout ce que tu sais, c’est que tu es persuadée de le reconnaître, ce pour quoi son nom s’échappe de tes lèvres lorsque tu es assez près pour qu’il t’entende. - Pavel Slavìk ? Un éclat curieux dans ton regard, les lèvres un peu pincées tandis que tu le dévisages encore. Était-ce bien lui ?

Sa réaction n’est pas celle à laquelle tu t’étais attendue. Tu sais que ça fait longtemps, quelques années même mais bon, t’aurais cru qu’il se serait souvenu de toi. Après tout, tu avais fêté avec lui ce noël où son frère t’avait demandé en mariage, quelques mois avant que l’apocalypse vous tombe dessus. Tu affiches donc une mine déçue, incapable de vraiment cacher ce que tu ressens et ce, quand bien même tu es d’ordinaire assez bonne actrice. Parce que tu n’as pas besoin de faire semblant pas plus que tu en as envie. T’es d’autant plus embêtée lorsque tu le vois t’éloigner. Tu ne peux quand même pas faire si peur que ça, si ?

Tu hésites, partagée entre la déception évidente et une confusion certaine en le voyant faire, confusion qui ne fait que s’accroître lorsque tu entends ses derniers mots. - Comment ça une stalkeuse ? T’étais pas ici, ces dernières années et ce, peu importe ce que ce ici est supposé être. Toi, t’étais à la surface. Et quand bien même tu devrais être heureuse pour ceux ayant vécu leur petite vie tranquille ici, à quelque part tu es jalouse. Terriblement jalouse. Assez pour afficher une mine un peu plus dédaigneuse, ne serait-ce que parce que alors que toi tu cherchais à survivre tant bien que mal, alors que tu voyais le monde s’effondrer tout autour de toi et ton fiancé mourir, d’autres ont pu semblerait-il devenir populaire, assez pour avoir à se soucier de stalkers.

Comme s’il s’agissait d’un vrai problème. D’un gros problème.
Et ça t’écoeurait peut-être plus que tu n’osais l’admettre.

- Non, je ne suis pas une stalkeuse. Un peu plus brusquement que précédemment. - Charlotte. La fiancée de ton frère ? Tu ne devrais pas réagir comme ça. Tu ne sais même pas pourquoi est-ce que tu réagis comme ça. Peut-être parce que l’insouciance de la réalité que a frappé la surface est quelque chose qui te dérange. Peut-être parce que tout est encore trop frais pour toi. Parce que tu vois encore toutes ces horreurs qui ont ponctué ton quotidien lorsque tu fermes les paupières. - Ravie de te revoir hein. Pourtant d’ordinaire si douce, avec ce sourire éclatant, voilà que t’es un peu plus fermée, un peu plus désagréable. Un peu plus de mauvaise humeur, surtout. Peut-être que t’es devenue plus susceptible avec le temps parce que voilà que t’es vexée. T’es vexée et un peu écoeurée.

T’es surtout jalouse. Jalouse de la vie qu’il a pu avoir.
Que tous ceux ici ont pu avoir.