Ji-Hoon regarda à travers la vitrine. Le temps était magnifique pour un jour de fin avril. Le ciel était dégagé, le Soleil brillait et il ne faisait pas trop chaud. Le jeune Coréen aurait pu aller se prélasser dans un parc, ou même revoir certaines de ses nouvelles connaissances. Voire même ses amis, s’il pouvait les appeler ainsi. À la place, il était coincé dans son herboristerie. Il aurait pu la fermer pour la journée, personne ne le lui en aurait voulu, mais il voulait être là en cas de besoin. Il était donc bien coincé…

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Le Caerien eut un petit ricanement à cette pensée. Cela faisait plus d’un an qu’il se trouvait à l’aise dans sa boutique sans d’autres personnes que les patients. Et là, il se surprenait à vouloir plus. Cela ne pouvait signifier qu’une seule chose : il allait mieux. Il n’oublierait jamais la douleur de perdre Sun-Hwa, ses grands-parents ou ses parents, bien qu’il ne perdît pas espoir pour ceux-ci, mais il apprenait à vivre avec. Elle faisait partie intégrante de lui maintenant. Il avait changé après toutes ces épreuves, il était quelqu’un d’autre à présent. Il n’était plus le petit garçon qui avait perdu ses parents, ni l’adolescent qui avait sauté dans un gouffre à la suite de sa sœur. Il était un adulte, et des gens dépendaient de lui et de sa boutique. Il devait faire de son mieux pour les aider, comme ses grands-parents le lui avaient appris.

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Plus déterminé, et moins distrait par l’extérieur, Ji-Hoon retourna vers son arrière-boutique. Il avait pas mal de rangement à faire ainsi que du réassortiment. Si certains clients savaient ce qu’ils voulaient et ce dont ils souffraient, d’autres aimaient flâner dans le magasin, même s’il n’était pas très grand, pour choisir des tisanes ou des huiles essentielles. Souvent plus pour leur goût ou leur odeur, que pour leurs effets sur la santé. Le jeune herboriste souleva donc une caisse qu’il avait rempli de flacons et l’amena vers l’avant. Il la posa devant l’une des étagères et en sorti les huiles une à une pour les poser délicatement sur le présentoir. Il ne voulait surtout pas les faire tomber car en plus de risquer une réaction en chaine, ce type de produit était horrible à nettoyer. Ce qu’il avait malheureusement appris par expérience. Puis la clochette attachée au-dessus de la porte résonna, et le Coréen pensa qu’il avait bien fait de ne pas fermer boutique.

Les pas s'alignent dans une fiévreuse frénésie. Zig-zaguant d'une manière malhabile, la paume contre la plaie béante sur le bras gauche, une blessure due à une balle, Mickael en a la vue embrumée,floutée. Le cœur est en tempête, les tempes battent follement, marquant l'affolement et la perdition de notre blondinet. Le souffle haletant, ses iris glacés qui lancent des regards en panique derrière son épaule pour évaluer la distance qui le sépare de ses assaillants, Mickael finit par se faufiler dans le marché. De là il achète quelques vêtements et se cale dans un coin pour troquer sa tenue de soldat, bien trop repérable, contre des vêtements lambda. Il en profite pour déchirer quelques tissus et former un garrot solide afin de stopper les saignements. Même si sa vue est toujours trouble, il sait qu'il peut encore poursuivre sa route et échapper à ses agresseurs.

Comment est-ce arrivé me direz-vous? Sans entrer dans les détails, disons que sa dernière mission d'infiltration a eu un fâcheux dénouement. Il n'avait pas prévu de tomber nez-à-nez sur une ancienne conquête dans ce bar militaire qui a tout de suite grillé sa couverture. On vous prépare à certaines situations dans l'armée, mais quand celle-ci se présente à vous il est souvent ardu de se conformer aux manuels ou aux recommandations. Vous êtes seul et là Mickael déguste! Il a fait appel à son unité qui l'a conseillé de rester couvert le temps que les renforts arrivent. C'est donc le premier objectif du blond, trouver un lieu de repli où on ne viendrait pas le chercher.

Au bout d'une heure, tandis que les battements de son cœur se stabilisent avec l'arrêt du saignement et qu'il est persuadé être hors d'atteinte, il aperçoit une boutique. Elle est plutôt isolée et n'inspire pas la méfiance. En outre peut-être que la personne qui s'y trouve a suffisamment de connaissance en médecine pour le soigner? Mickael veut tenter sa chance. Alors il pousse le battant qui fait office de porte d'entrée. La vue toujours trouble, Mickael articule à peine quelques mots.

-J'ai besoin d'aide...

La vue se brouille, Mickael tourne de l'œil et s'étale au sol, inconscient.

La journée avançait calmement. Il ne se passait pas grand-chose tandis que Ji-Hoon réarrangeait les étagères. Du coin de l’œil, il ne voyait pas beaucoup de monde passer dans la rue. Personne ne rentrait dans la boutique. C’était comme ça, il y avait des jours creux. Ils étaient plus durs et plus longs que les journées bien remplies, mais le jeune Coréen se disait qu’au moins personne n’avait besoin d’aide. Pas de malades, pas de blessés. Rien du tout, ou presque… Alors qu’il s’abaissait pour ramasser la caisse et la ramener à l’arrière du magasin, il entendit la porte s’ouvrir et les clochettes sonner. Avant qu’il ne puisse dire ou faire quoique ce soit, le malheureux demanda de l’aide et s’écroula au sol. L’herboriste se retourna alors et se dirigea aussi vite que possible vers son patient. Ses mains, tout comme sa voix, tremblaient légèrement.

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Monsieur, monsieur ? Vous vous sentez bien ?

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Aucune réponse. Le stress montait encore plus et l’herboriste se pencha sur le malheureux. Heureusement, il entendit une légère respiration. Il fut soulagé de voir qu’il était toujours en vie, mais cela ne signifiait pas pour autant qu’il était sorti d’affaire. S’il s’était évanoui, c’était bien pour une raison précise et il devait la découvrir la plus vite possible s’il voulait l’aide. Le Caerien positionna l’homme sur le dos, et le tira au milieu de la boutique. C’était plus facile de l’ausculter ainsi ! Cependant, il n’eut pas à chercher longtemps pour comprendre. Son bras gauche était enserré dans un tissu imbibé de sang et donc il y avait une blessure qu’il avait tenté de bander pour limiter les dégâts. C’était plutôt malin, mais cela risquait de ne pas suffire si on n’agissait pas tout de suite. Si Ji-Hoon n’agissait pas.

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Le jeune homme ferma alors les yeux et tenta de se concentrer. Il devait agir de la manière la plus efficace possible. Il commença donc par regarder l’étendue de la blessure, et déroula lentement le bandage. Il n’y avait qu’un trou au niveau de son biceps qui saignait abondement. Était-il possible que ce soit une blessure par balle, et que la munition soit restée coincée dans son bras ? Il ne s’y connaissait pas assez pour être catégorique… Aussi, il préférait être trop prudent. Il se leva donc alla chercher du matériel. Il lui fallait de quoi faire un garrot et de quoi récupérer la possible balle. Puis, il devrait refermer la blessure même s’il ne savait pas comment faire. Et qu’il ne l’avait jamais fait. Cependant, il valait mieux qu’il se concentre sur une chose à la fois. La balle, puis refermer.

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Quelques secondes plus tard, il revint de son arrière-boutique avec des tissus, une pince et de l’alcool pur. Il commença par enserrer le haut du biceps pour limiter l’afflux de sang, et stérilisa du mieux qu’il pouvait son instrument avec l’éthanol. C’était maintenant ou jamais. Ji-Hoon eut un haut-le-cœur en s’imaginant dans le bras d’une personne, mais se ressaisit immédiatement. Il n’avait plus le choix ! Il plongea délicatement la pince et chercha à l’aveugle la balle.