L'espionnage n'était pas vraiment une de tes plus grandes qualités, du moins reconnues de tous. Mais Alexander lui-même t'avait chargé d'être sur le terrain. Face à ce monde de menteurs, il voulait compter sur quelqu'un qui serait incapable de le trahir. Il t'avait donc mis en relation avec Chris directement. Si le plan d'origine consistait à faire le gai, tu t'étais engagée, imposée à retrouver les papiers toi-mêmes. Même dans une mission aussi délicate, tu te sentais incapable de déléguer.

Une fois sur place, tu avais glissé ton épée sous ta robe de servante, la liant habilement par des professionnels du tissu afin qu'elle ne soit pas visible mais parfaitement en osmose avec ta tenue. Micro en place, tu n'avais pas eu le temps d'être présentée à ton partenaire de crime, pour un soir. Tu espérais quelqu'un de ne pas dissipé, quelqu'un qui obéirait et qui serait en phase avec la discipline et l'ordre.
Nom de code : Emeraude.

Et quand tu l'aperçois, ton coeur loupe un battement. Les sentiments aspirés, tes yeux papillonnent sans le lâcher du regard. Tu le toises d'une froideur vide de toute émotions et répond à son compliment avec détachement.

— « Merci, Emeraude. La votre n'est pas mal non plus, elle vous reflète davantage votre personnalité. » Un serviteur. « Et cela change de l'accoutrement ridicule que vous affichez en temps normaux. »

Et sans même prendre la peine de décliner son invitation, tu te sépares de lui au premier croisement, te mêlant à la foule et aux invités, plateau sous la main. Le visage en feu, de gêne ou d'une rancune tenace, tu ne saurais l'expliquer. Mais le voir te faisait de l'effet, sans aucun doute. Pourquoi le destin te le recollait dans les pattes après ces semaines de silence mutuel ?

Tu souris à quelques convives un peu pompeux, restant toujours en mouvement pour ne pas qu'on discerne tes lèvres bouger. Servir n'était pas à dans ton habitude (c'était même plutôt l'inverse) mais te prêter au jeu te rappelait tes premiers jobs étudiants.

Emeraude te susurrait des nouveaux mots doux à l'oreille, vous étiez revenu à cette fâcheuse habitude. Il te pique à vif et tu sens le métal de ton épée chatouiller ton dos en contractant tes muscles. Si vous en sortiez victorieux, il serait mort.

— « Parfait Emeraude. J'en ai profité pour faire un détour à la vallée des Constellations et je suis tombée sur un ancien ami là-bas. Lui et moi pour le coup, c'est une relation particulière. »

La vengeance était sale, mais elle faisait du bien.

HRP : Isadora est arrivée en même temps que Mephisto, son épée cachée sous sa robe et est partie dans la direction opposée de lui pour servir les convives sans se faire repérer.

L'offensive était le seul moyen de défense que tu connaissais. Il te parlait d'honneur, mais c'était lui qui l'avait sali une première fois. T'abandonner à qui que ce soit était plus qu'exceptionnel, et il avait réussi l'exploit ne pas le prendre en compte. Qu'il en paie les conséquences, désormais.

Tu manques de faire tomber le plateau de petits fours, avoir quelqu'un dans l'oreille n'était pas très agréable et facile à gérer. Une goutte de sueurs perle le long de ta tempe et tu te reprends vite, articulant nerveusement.

— « Emeraude, tu n'oserais pas me commander tel crime. Ce pauvre petit n'a rien fait de mal, il n'est que l'instrument déloyal que j'ai utilisé pour te provoquer réaction. » Tu souffles à ton tour. « Ne l'écoutez pas tout court Chris, il n'y a pas que son humour qui est douteux. »

Tu observes tout autour de toi, profitant du silence qu'il t'accordait quelques instants. Tu aurais aimé garder un oeil sur Rodrigo mais tu savais d'autres infiltrés sur le coup. Alors quand la voix de Mephisto revient te susurrer narquoisement à l'oreille, tu réprimes un rictus d'agacement.

— « Compte là-dessus. » Tu traverses la foule le pas léger pour ne pas attirer le regard, ton épée restant bien fixe dans ton dos. Ces filles avaient fait des miracles. Tu poses le plateau sur un des buffet et te glisses vers les couloirs déserts de l'immense demeure, hôte de la soirée. Vers l'escalier en colimaçon, tu aperçois le démon et son sourire de diable.
Tu ne lui rend pas et passes une main dans tes cheveux pour les remettre en place.

— « Tu as eu le temps de trouver quelque chose ? »

HRP : Isadora a posé son plateau de petits fours sur un buffet et a rejoint Mephisto pour commencer l'exploration incognito.

Mephisto et ses murmures suaves. Tu fais mine de pas y être réceptive, trop tendue. Tu ne voulais pas risquer d'abimer son si beau visage à griffer ses joues de tes ongles bien aiguisés. Il se décoiffe pendant que tu te recoiffes, et tu ne peux pas t'arrêter de l'imaginer comme un double maléfique, instable.
Tu te mords la lèvre au timbre succulent de sa voix murmurant, des insanités.

— « Mephisto. Le jeu s'est terminé la dernière fois quand tu as fui la partie. Maintenant cesse donc d'être aussi- » Tu ne finis pas ta phrase, sentant ses doigts chatouiller tes hanches. Ton dos se cambre à nouveau, faisant raper la lame de l'épée aux creux de tes reins.  « Il suffit ! »

La voix de Chris résonne dans ton oreille et tu replaces le micro correctement dans ton oreille, un peu agacée de perdre pied dans une mission aussi importante. La réflexion de votre employeur te fit grincer des dents. Tu assénas un regard assassin vers ton acolyte du soir, l'air de dire « Tu es satisfait maintenant ? » D'une voix ferme, tu rétorques à Chris. « Je vous assure que vous ne direz rien car il n'y a rien à dire. »

Tu suis tout de même Mephisto, résistant à l'envie de l'embrocher sur le champ. En plus de venir chercher le contact, il cherchait aussi les ennuis. Et avec toi comme bouclier, il allait vite les trouver.
Deux gardes barrent la route, et tu lèves les yeux au ciel quand il parle de démonstration.
Si seulement vous pensiez à la même chose. Tu aurais aimé que ça soit si simple de te battre contre eux, et de remporter la bataille. Mais il allait falloir user d'autres compétences, dont tu n'étais pas sûr d'avoir.
Et plus vite que tu ne le pensais, vu qu'ils se dirigeaient déjà vers vous.

Entre Chris à l'oreille et Mephisto à ta droite, c'était dur de se concentrer. Mais soit, tu allais devoir lui faire confiance. De ton plus mauvais jeu d'actrice, tu laisses échapper un soupire de désespoir.

— « Dites-moi Messieurs... Un des convives a porté atteinte à mon intégrité physique et je me suis isolée. Mon collègue tentait de me rassurer mais il doit retourner travailler. Les hommes profitent que je suis nouvelle et inexpérimentée ! » Tu réprimes un sanglot, au fond de toi, tu avais juste envie de vomir. « S'il vous plait, j'ai besoin de vous pour m'escorter jusqu'à Marianne. »

Tu t'approches de l'un d'eux pour te laisser tomber dans ses bras, mimant d'être un peu étourdie et par dessus l'épaule du garde inquiet de ton état, tu lui fais signe de d'avancer sans toi. Tu le rejoindrais plus tard. S'il avait un commentaire à faire dans l'oreillette, c'était maintenant.

HRP : Isadora décide de jouer la carte de la fille fragile qui a été agressé et demande aux deux gardes de l'escorter, tombant littéralement dans les bras de l'un deux. Elle fait signe à Mephisto de passer et d'y aller seul.

Si Mephisto se targuait d'être dégoûté, que devais-tu penser, toi ? C'était toi qui avait le mauvais rôle, pas lui. Le chemin pour retourner dans les cuisines avec les deux gardes fut un peu long... et surtout éprouvant. Jouer la fille éplorée et fragile avait une date limite de consommation, et elle était dans les trois minutes après ouverture.

La fameuse Marianne n'était pas là et tu en profitas pour servir tes deux sauveurs pour les remercier de leur bienveillance, leur proposant de se rafraîchir avant de retourner à leur poste. Toi, tu devais vite reprendre le tien. Alors à peine le verre porté à leurs lèvres que tu avais déjà disparu.

Tu avais couru à travers les couloirs pour retrouver ton chemin, indiquant à Chris (et à Mephisto au passage) que tu allais rejoindre celui-ci. Il ne fallait pas attirer les soupçons une deuxième fois sur vous.

— « Ridicule peut-être, mais c'est grâce à moi que tu as pu t'infiltrer, ingrat ! »

Une fois sur place, tu plies le corps vers l'avant, mains sur les cuisses pour reprendre un peu ton souffle. Décoiffée et un peu débraillée, tu jettes un regard courroucé vers Mephisto. Les caméras oubliées (il ne devait pas y en avoir, du moins tu l'espérais), tu te diriges vers lui pour le coincer contre le mur, le bras pressé contre sa gorge.

— « Emeraude, je te trouve très injuste avec moi. De nous deux, tu n'es pas le plus utile ici. »

Tu retires le micro de ton oreille et tu souffles, tes lèvres taquinant les siennes.

— « Ne crois pas que je vais continuer d'endosser le rôle que tu essaies de me donner. » Tu ressers un peu plus ta prise sur son cou, coupant un peu sa respiration. « Je ne suis pas TA reine, c'est clair ? » Sa générale, peut-être.

Les lèvres sont hésitantes à venir rejoindre les autres, et sans bouger, tu remets le micro à ton oreille. « Chris ? Vous êtes là ? On attend vos instructions. »

HRP : Isadora serre deux verres aux gardes en cuisine et s'éclipse rapidement pour aller rejoindre Mephisto. Elle le chauffe un peu woops et attend les retours de Chris.