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Le Castello Orsini-Odescalchi est un magnifique château surplombant le lac de Bracciano. Construit au 15ème siècle, c’est un joyeux architecturale de la renaissance et l’un des monuments les mieux préservés d’Italie… »
Lucrèce referma le livre qu'elle était en train de lire, elle n'avait pas le cœur à travailler.
Ce jour-là elle n'aurait pas dû être dans un vieux château décrépi mais se trouver à Moscou, en train de pleurer avec son amie. Malheureusement, sa thèse ne lui avait pas laissé le choix; elle devait être finie à la fin du mois. Lucrèce ne pouvait pas se permettre un voyage de plusieurs jours. Quelle foutue thèse. Quel foutu sujet*.
Lucrèce sortit des archives et se rendit sur les remparts du château. C'était là qu'il y avait la meilleure connexion réseau. Devant elle, un immense lac prenait place, de l'autre côté, Rome lui faisait face. Elle sortit son portable, tapa le numéro, la boule au ventre. Aujourd'hui, c'était un jour spéciale pour Sasha. C'était un jour spéciale, et Lucrèce n'était même pas là pour la soutenir dans cette épreuve.
Le téléphone sonna dans le vide. C'était bizarre.
Elle décida de laisser un message :
« Sweetie, comment tu vas? Tu sais que… »
Lucrèce s'arrêta net.
Devant elle, Rome s'effondrait.
Des avions s’écrasaient contre des barrières invisibles et d'immense nuages éclataient en sanglot sur la ville. Un bruit insoutenable résonnait dans l'air.
Le téléphone glissa des mains de Lucrèce pour venir tomber à terre. Elle assistait, impuissante, à la fin de Rome.
Elle fut rejoint sur les remparts par les sept autres personnes présentes ce jour-là au Castillo Orsini.
Alors qu’ils fermèrent l’accès au château, des gens commencèrent à affluer. Les messages n’étaient pas joyeux : des malades se transformaient en monstre, tandis que le monde lui-même partait en miettes. Face à cette afflux, ils durent s’organiser. Les huit personnes présentes ce jour-là formèrent le "conseil" et décidèrent des règles à appliquer dans le château. Lucrèce en était la plus jeune membre ; mais pas la plus inutile. Elle eut à charge l’architecture du château. Redessiner les pièces pour les rendre habitables, fortifier les remparts pour éviter toutes intrusions. Les monstres ne tardèrent pas à arriver pour se jeter sur ces grands murs épais.
Dans un premier temps, Lucrèce pleura sa famille et ses amis engloutis dans la chute de Rome. Rapidement, pourtant elle se ressaisit: les murailles n'allaient pas tenir toutes seules. Et les assauts des monstres étaient si nombreux.
Le conseil accepta de recevoir jusqu’à soixante personnes dans leur groupuscule. Bénéficiant d'une forteresse de premier choix, ils privilégièrent les personnes les plus utiles. Certains étaient pêcheurs au lac d’à côté, d’autres agriculteurs ou couturiers. Malgré tout, même si le Castello devint la place la plus sûre des environs, des monstres arrivaient toujours à y forcer l'entrée. Alors, ils durent se faire oublier. Vivre à la lueur des bougies et faire le moins de bruit. Fini la vie de fêtes et d’opulences, bonjour la monotonie et l'austérité. Même la peur vint s'en mêler.
La vie fut presque agréable, pendant les quatre premières années. Lucrèce devint la plus choyée: après tout, elle était indispensable n'est-ce pas? Si seulement ces monstres les laissaient en paix, tout serait parfait.
Malheureusement, à l'aube de la cinquième année, lors de l’automne, le lac fut contaminé et les champs brûlés. Leur source de richesse n’était plus et ils passèrent le pire hivers depuis la début. Ils manquèrent de poisson, puis de viande, et même les légumes ne furent plus suffisants pour nourrir cette soixantaine de personne. La famine s'installa dans le château.
C’est à ce moment-là que des habitants des environs, puis du Castello, vinrent à disparaître. Aucun membre du conseil ne sembla être au courant, mais la viande réapparu mystérieusement. La famine naissante disparue bien assez vite.
Lucrèce ne fut au courant des mesures prises par ses pairs du conseil qu’à l’aube du printemps. Il fallait bien survivre, disaient-ils. C’était de la miséricorde, clamaient d’autres.
Elle en vomit toute la nuit.
Comment avait-elle pu se repaître de la sorte ?
Un sentiment de malaise naquit en elle. Elle avait besoin d’oublier. De fuir. De partir loin d’ici.
Lucrèce s’enfuit cette même nuit.
De son rang de princesse privilégiée, il ne restait qu’une petite statuette qu’elle avait fabriqué.
De ces années agréables, le souvenirs étaient devenus abominables.
Elle courut une partie de la nuit, s’enfuyant loin d’ici. Elle courut si vite, pour échapper à tous ces montres qui voulaient intenter à sa vie. À toute cette folie qui s’était emparée du Castillo. Elle voulait retrouver ses parents. Elle voulait redevenir une gamine insouciante dans un monde enchanté. Dans son monde de fêtes et de paillettes.
Ses pas la menèrent à Rome, près du gouffre. Celui qui, cinq année plus tôt, avait précipité le monde en enfers. Celui qui l’avait privé de sa famille, laissé avec cette communauté et poussé à faire des choses infâmes.
Elle observa longtemps le gouffre en silence.
Puis, sans un mot, Lucrèce se laissa tomber dedans.
Avec cette rédemption, elle pourrait enfin aller de l’avant.
La chute fut longue. Si longue.
En cours de route, la belle défaillit.
A son retour, elle découvrit des lieux étranges. Inquiétants. Une étrange atmosphère s'en dégageait. Elle devait vite partir d'ici.
Alors, Lucrèce se leva. Et elle marcha. Elle suivit les murmures du vent.
La chance fut avec elle ce jour-là: quelques heures plus tard, elle découvrit une interstice par lequel se glisser. La voilà arriver dans un désert, grande étendue de sable dominée par un soleil tapant. Lucrèce le surplombait, avec sa robe de princesse, vestige d'un autre temps emprunté au Castillo Orsini. Elle ne ressemblait plus à rien cette magnifique robe; des pans de tissus entiers partaient en lambeaux tandis que des dizaines de troues laissent apercevoir ses dessous. Lucrèce non plus ne ressemblait plus à rien. Durant sa longue fuite, ses long cheveux s'étaient abîmés et emmêles.
Et pourtant, elle ne réussit pas à s'en débarrasser. Fatiguée, exténuée, Lucrèce continua de traîner sa robe à travers le désert, seul souvenir de son passé.
Assoiffée, elle faillit s'abandonner entre les griffes de ce désert affamé. C'est les recruteurs qui la sauvèrent. Plus précisément, Caer Hird la sauva. Les autres l'abandonnèrent lâchement sur le côté. Tout en lui tendant la main, ce recruteur-ci lui proposa de rejoindre son royaume.
Caer Hrid, qu'est ce que cela sonnait bien.
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Habitants de Caer Hrid, préparez vous à accueillir la plus grande diva du Castello Orsini-Odescalchi.
*Sa thèse en architecture portait sur : «
Comment l’architecture des châteaux de la renaissance influencent l’architecture moderne ».
-> Son travail principale c'est architecte, elle peut vous réaliser un bâtiment dans n'importe quel style. Attention: ce qu'elle fait doit être beau. Elle ne veut pas laisser son nom sur un bâtiment sans intérêt.
-> Elle peut aussi réaliser des statues, mais cela reste plus une passion. Son objectif est néanmoins de devenir une artiste en vue. Bon pour l'instant c'est pas trop ça : qui voudrait des nains de jardin?
-> Vous la croiserez souvent dans les lieux de villégiature, d'art et de la fête. Et aussi dans les beaux restaurants, ou en terrasse. Enfin, dans n'importe quel lieu branché en somme.
-> C'est une vrai habitante de Caer, elle est très attachée à ce royaume qui lui a ouvert les bras tandis que les autres l'ont repoussé. Elle est prête à faire beaucoup pour celui-ci.
-> Elle essaye de mettre ses souvenirs du château d'Orsini et de sa fuite de côté : elle ne se pardonnera jamais d'avoir mangé de la chair humaine. Elle tremble de revoir l’un de ces monstres. Elle en souffre beaucoup et essaye de se soigner. Elle se drogue et ira surement voir un médecin prochainement – elle ne veut surtout pas que cette histoire se sache. C’est aussi pour ça qu’elle agit comme elle le fait.
-> Attention: Lucrèce c'est une diva extravagante qui exagère à outrance. Insouciante et naïve, pas méchante pour un sous, elle est juste un peu déconnectée de la réalité des choses. Soit on adore son caractère, soit on la déteste - et à raison, qu'est-ce qu'elle est exubérante.