C’est vers 14 heures que Pavel s’était présenté vers celui qui était maintenant son ‘nouveau’ voisin depuis quelques jours déjà. Bien plus qu’il aurait aimé admettre, cette bombe nocturne avait sitôt écourtée sa nuit : le hamster qui lui servait de cerveau s’était mis à rouler comme jamais dans sa roulette. Pavel soupira avant de marteler, tel un psychopathe sur sa victime, la sonnette et s’arrêta à la 10e fois, son anxiété prenant le dessus : et s’il s’était trompé de maison ? Ce qui était quand même stupide, considérant qu’il avait une chance sur deux de se tromper, mais comme il commençait à angoisser et à considérer abandonner le projet et retourner dans le confort de sa petite maison, il se souvient qu’il avait un holokit, alors réajustant le sac qu’il tenait, il sortit l’appareil de sa poche.

Il s’apprêta à déverrouiller le lockscreen qu’on ouvrit la porte.

« Donc, tu es marié. » Pavel poussa (força) le sac contenant la pâtisserie dans les mains de son interlocuteur avant de faire genre, qu’il avait sa vie sous contrôle et qu’il n’avait pas été à deux doigts de paniquer. Il jeta un coup d’œil derrière l’homme, au cas où il n’apercevrait pas cette fameuse ‘Éolia’, sa femme. Pas qu’il ne faisait pas confiance au catcher, mais… au nombre de concussions qu’il avait dû avoir, c’était quand même facile de s’imagine que…

Enfin. Il baisa son masque et ses lunettes de soleil, réalisant que Fenrir l’avait peut-être pas reconnu.

« C’est un gâteau… surprise, » qu’il dit, jetant un œil au paquet, comme si celui-ci était une bombe menaçant d’exploser.

Aussitôt que le mot ‘malade’ s’extrait de la bouche de l’homme sanglier, les yeux de Pavel cascadent sur la bombe –ou autrement appelé, cloche à gâteau et considère (pendant une seconde ou deux) de le lui arracher. Ce n’est pas qu’il n’accorde pas une confiance aveugle en les talents culinaires de Rachel, mais c’est qu’elle a une forte tendance à y ajouter des ingrédients mystères, résultant en de drôle de surprise. Il ne savait qu’elle maladie sa femme était accablé, mais il se disait –avec raison, qu’elle n’avait probablement pas besoin de crampes intestinales.

« En fait… il faut l’estomac solide pour ce gâteau, donc je pense qu’il serait mieux de ne pas l’attendre. » Au pire, il apportera un cupcake le lendemain, pour se faire pardonner. Fenrir, quant à lui, avait la résilience d’une blatte, alors Pavel avait pas trop peur pour lui.

Difficile à rater, oui, mais il n’avait pas de l’avoir croisé. Mais venant de l’ancien fonctionnaire, ça ne voulait rien dire, considérant son horrible mémoire pour les visages. Néanmoins, il sourit et acquises vaguement d’un signe de la tête ; totalement pas à l’aise de commenter ouvertement l’apparence de la femme d’un ami. Pavel observe la décoration du salon, se dit que ça fait très Fenrir avant de prendre place sur le premier canapé qu’il voit.

« Pourquoi t’aurais à te soucier de la transcendance ? » Aux dernières nouvelles, il n’en était pas atteint, non ? Pavel tilt. « Oh, euh… mes… sympathies. » C’est la première fois qu’il se trouvait confronté à un malade ; les formules de politesse étaient loin d’être acquise. « Donc, j’imagine que tu dois arrêter le catch ? »

Il y a un silence et il se dit que peut-être est-ce un sujet trop délicat (même si Fenrir était pas reconnu pour faire dans la dentelle).

« Non, j’ai quitté le gouvernement, ça devenait très difficile. »

C’est le silence qui s’interjette en guise de réponse. Un peu parce que le sujet se dirige sur une pente glissante, mais aussi parce que sauf se montrer compatissant, Pavel ne sait pas quoi ajouter de plus. Alors, il est bien content (et soulagé) que la conversation s’oriente sur le catch. L’ex-fonctionnaire se réajuste dans le fauteuil avant de dévisager son vieil ami.

« Oh. »

Oh. Oh, j’aurais cru qu’avec la maladie, t’essaierais de ne pas en rajouter avec les possibles contusions. Mais plutôt que rouvrir un sujet qu’il pensait avoir clôt avec panache, il se tait, laissant libre court à la surprise pouvant être interprétée de mille et une façon. Et il la répète, cette fois-ci avec un peu moins de jugement et beaucoup plus d’entrain :

« Oh ! »

Et il sourit. Ayant toutefois remarqué que Fenrir semblait avoir du mal à se déplacer, il choisit de ne pas commenter, tout ça allant à l’encontre de sa résolution de taire le sujet de la maladie, enfin, sauf si le sanglier souhaitait y retourner.

« Oui, Kazuki… » Pavel dit sur un ton légèrement monotone, supprimant l’envie de claquer son front de la paume de sa main, décourager que son concitoyen soit si ignare au point de ne pas se rappeler du nom de la main droite de leur président. « Effectivement, mais tu ne perds rien à t’y intéresser un peu… parce que le jour où Célestia va perdre du territoire comme Caer… » Enfin bref. Si ça ne l’intéressait pas, alors ça ne l’intéressait pas.

« J’évite les paparazzi. » Toujours sur le même ton morne, c’aurait pu être une très bonne blague, sauf que c’était vrai : depuis qu’il s’était amusé à sauver des vies en s’improvisant pompier, la cote de son alter-ego avait ressuscité (tel le Phoenix) de ses cendres. « Et je me suis lancé en horticulture. » Puis, s’avançant près de Fenrir pour pouvoir chuchoter, il ajoute : « donc si tu cherches des fleurs, c’est à côté. » Il pouvait même lui faire un prix d’ami. Il aurait ajouté ‘ah, et j’ai fait un homicide involontaire’, mais non seulement ce n’était pas approprié, c’était encore un sujet sensible.

« Ah ! Maintenant que j’y pense, comment fais-tu pour, euhm… pour que tes fans ne soient pas justement en train de cogner à ta porte ? » Après tout, Fenrir, fameux catcher de Célestia, avait une tête très reconnaissable.

Pavel n’était pas certain que ‘ne pas craindre’ soit un argument convaincant. Mais soit, il jette l’éponge, préférant abandonner que se lancer dans un débat qui, de toute façon, ne mènera à rien. Et Fenrir semble d’accord, car le sujet est bien rapidement balayé sous le tapis. Il rit, sauf que le rouquin n’entend pas à rire : franchement dérangé par les gens qui s’immiscent dans sa vie privée en quête d’un cliché qu’il n’a même pas envie de prendre parce que- Pavel arrête le fils de sa pensée. Une autre pente glissante d’esquivée. Ça faisait très très longtemps qu’il n’avait pu papoter avec l’homme-sanglier, alors venir vider son sac après tout ce temps… Eh bien, après mure réflexion, ce n’était pas la meilleure des idées.

Surtout qu’il venait d’apprendre qu’il était malade.

« Fais-donc. En plus c’est la porte d’à-côté. » Pavel jette un coup d’œil en direction de sa maison. « Littéralement. » La suite le surprend et il fait presqu’un bond sur son canapé. « Je… non ! Je ne donne pas mon adresse à n’importe qui ! » Offusqué, il le prend presque comme une accusation. Pavel se passe une main dans les cheveux, soupire et s’affaisse de nouveau contre la fabrique du canapé qu’il commence à apprécier.

« C’est pas comme si j’essayai d’entretenir la côte ou que je me souciais du nombres d’abonné, mais tu sais quoi ? Semblerait qu’éteindre un feu suffisse à raviver la flamme des fans… fans de quoi ? Je n’ai pourtant rien fait d’exceptionnel. » Il grommelle, avant d’ajouter : « tu devrais être plus populaire que moi. » Il couvre son visage de ses mains. « Après tout, c’est toi la star du sport… Aaaah… »

Pavel s’arrête pour dévisager Fenrir.

« Attends, sauf ton respect, c’est peut-être parce que ton nom n’accroche pas ? » Oui bon, Fenrir, c’est puissant, c’est unique, mais dans un monde pour la mythologie a inspirée de nombreux parents, peut-être que ça ressort moins. « T’as pensé à changer ta marque de lutteur, enfin, de catcher ? »

Y’a sa mâchoire qui a envie de décrocher et de prendre ses jambes métaphoriques à leur cou. Y’a cette envie irrépressible de prendre Fenrir par les épaules et de le secouer jusqu’à ce que ça lui rendre dans la tête que Pavel, non plus, ne cherche pas à ce qu’on cogne à sa porte. Et il le ferait, l’ancien fonctionnaire, si ce n’était du fait qu’il se rappelle que son cher ami est malade. Autant ces monstres sont-ils effrayant que le rouquin n’a pas dans ses plans d’abandonner son ami –son seul ami à son triste sort. Le catcher ne semble pas être le type à vouloir être prit en pitié, alors Pavel tient le sujet mort et espère que le message se rende télépathiquement.

Et, c’est assez facile en fait, d’oublier que l’homme à ses côtés est malade, car il ne le laisse pas paraître. Essaie-t-il d’être fort ? Pavel se lève silencieusement de son fauteuil pour aller rejoindre Fenrir sur le canapé et de lui tapoter l’épaule avec compassion en secouant la tête.  Au moins, il rit à ses propres blagues, quoique Pavel ne fût certain que ça en soit.

« Je. » Incrédule. « Je ne pensais pas que dans ton livre, se faire oublier égalait croupir prison… » Il prend une minute pour réfléchir à la logique de la chose. « Puis, je ne suis pas d’avis que créer la controverse –parce qu’on s’entend sur des enfants, c’est controversé… soit le moyen le plus efficace pour se faire oublier. »

S’il avait à choisir entre Worldvlog et l’étiquette de batteur d’enfants, le choix était vite fait. Mais bon, parler (raisonner ?) avec Fenrir, ç’avait ses avantages : simple, facile et étonnamment agréable.

« Tu sais, tu peux compter du moi. » Qu’il dit après un moment, se rendant compte que leur amitié pouvait évoluer et aller plus loin de la superficialité.