« Je suis Erina de Caer Hrid, juste Erina de Caer Hrid… » répètes-tu machinalement, comme une formule magique enchantée, comme pour tenter de te convaincre qu’il n’y a aucun monstre qui habite ton corps. Tu te tiens si droite, poings serrés, poings crispés, tu essaies de paraître grande, de paraître forte, d’être ce roseau qui ne se plie jamais ; tu veux être celle qui reste debout face aux tempêtes de sable, celle qui danse dans les ouragans, qui se moque des séismes, celle qui rit de tous les cataclysmes qui pourraient frapper l’univers. Tu aimerais être forte comme cela.
La vérité, c’est qu’au moment où Isadora te prend dans ses bras, tu sens les forces quitter tes jambes, tu te sens tituber, tu sens tout le poids du monde peser sur tes épaules, tu sens l’ombre de la mort faire disparaître toutes ces petites lucioles que tu as fait naître. Tu vacilles, flamme d’une bougie prête à s’éteindre, craignant le simple souffle d’un homme. Tu t’accroches à la générale, te tient contre elle, ton pilier, ton phare dans la nuit.

« Isadora, je crois que je suis un peu fatiguée. » Tes paupières sont si lourdes. Maintenant que toute l’adrénaline de la peur n’est plus, tu ne sens plus que l’épuisement. « Je vais.. me reposer un peu… » Tu t’appuies sur ta camarade alors que tu te diriges vers un fauteuil. « Juste une heure ou deux… » Avant de disparaître comme tu es arrivée : invisible, insaisissable.

Tu te roules en boule, ramènes tes genoux contre toi et tu t’assoupis ainsi, en espérant qu’il ne s’agira pas de tes derniers souvenirs avec Isadora.