Le désert. C’est un endroit où Carmen n’avait pas reposé les pieds depuis quelques jours. La Baie des Songes est un endroit rêvé, où le Marché Noir n’a aucune emprise, où le Marché Noir n’existe pas. Alors il faut dire que la brune se sent particulièrement bien dans un endroit tel que celui où elle vit actuellement, et où elle commence à se lier d’amitié – plus qu’avant – avec Iseult, une femme qu’elle apprécie grandement. Mais les Pirates des Sables ne disparaîtront jamais, pas tant que la tête de la Reine n’a pas roulé sur le sol. Pas tant qu’elle ne l’a pas éliminée.

Alors ses pieds s’enfoncent dans le sable chaud, elle marche avec une capuche relevée – il ne faudrait pas qu’on la reconnaisse – entre les tentes et à l’intérieur du campement. Elle n’est plus une oubliée, à présent. Elle est une Mirage. Mains enfoncées dans les poches, elle finit par quitter l’endroit après avoir récupéré les quelques informations dont elle avait besoin – à dire vrai, plutôt quelques affaires dans sa tente – puis voulait retourner vers sa nouvelle maison.

Mais ça, c’était sans compter sur l’ami d’une si longue période. Quelqu’un que, quand elle le voit encore aujourd’hui, son coeur menace d’éclater et de partir en fumée. Non pas d’amour, mais bien de panique et de stress – Mars l’effraie. Elle ne voulait pas le voir. Elle ne voulait pas savoir ce qu’il devenait après tout ça. Mais elle n’en a pas eu le choix. Même si la Capitaine a essayé de s’échapper, de s’éloigner de lui, elle a été rattrapée par ses torts. Par ses erreurs. Et ses défauts ne comptent pas la laisser s’échapper aussi facilement.

Elle essaie de se débattre, reconnaît immédiatement la poigne de l’homme qui la maintient et l’empêche de fuir. Une poigne dont elle n’arrivera définitivement pas à se défaire, malheureusement. Coeur battant, elle finit par abandonner l’idée de s’échapper – de toutes façons, il ne la laissera pas faire, sa question n’en étant pas une – et redresse simplement le regard dans sa direction.

« Ça dépend. Tu me l’offres ? »

Et son corps se tend lentement. Elle ne se débat plus, mais reste mortellement sur ses gardes. Carmen refuse qu’il lui arrive quelque chose maintenant.

« Ou il faudra que je paie, en plus de ça ? »

Parce qu’elle sait d’avance qu’elle ne va pas passer un bon moment.

Tout est fini. Les mots qu’elle a elle-même prononcés qui lui reviennent en plein dans la figure. Et ils lui font plus mal qu’elle ne l’aurait pensé. Sa poitrine s’écrase sur son torse alors qu’elle essaie de fuir le regard de l’homme qu’elle a aimé – comme un ami proche, comme un meilleur ami – mais elle n’y arrive plus. Une fois retournée vers lui, elle fait tout pour s’échapper, se débat encore plus. Mars lui fait du mal. Mais elle l’a mérité. Vraiment ? L’a-t-elle mérité ? Son cerveau ne suit plus. Elle essaie d’arracher la poigne de l’homme sur son poignet.

« Lâche-moi… ! Tu me fais mal ! »

Mais il ne le fera pas. Au contraire, il la traîne dans un coin où personne ne les verrait. Est-ce la fin pour elle ? Elle ne sait pas si Mars serait capable de l’éliminer. Mais à ce moment, elle a peur pour sa vie. Il a des questions. Elle va devoir y répondre. Forcée. Elle n’a pas le choix. C’est ce qu’elle mérite, mais une pointe de colère titille sa poitrine. Quand elle est lancée, elle roule sur quelques mètres. Recouverte de sable, elle se laisse rouler légèrement avant de tousser, puis tape sur le sol avant de se redresser.

« Parce que tu crois qu’il y a une putain de réponse à une question comme ça ?! Tu crois qu’on peut dire qu’on avait envie de le faire comme on avait envie de boire un thé, de prendre une photo ou de manger une pizza ?! Tu crois sincèrement que je suis arrivée, et que j’avais en tête que j’allais tuer Andy ?! » Ça y est. Lentement mais sûrement, Carmen commence à perdre pied.

« Tu crois vraiment que c’était volontaire ?! Tu crois vraiment que c’était ce que je voulais ? J’en sais rien, de pourquoi je l’ai fait ! »

Et elle rage intérieurement. Elle sait qu’elle n’aurait pas dû. Elle ne voulait pas. Mais son corps ne réagissait plus. Elle se redresse, secoue la tête, et ses bras tremblent légèrement. De rage.

« Pour quel genre de monstre vous me prenez, hein ? Vous croyez vraiment que j’ai pris du plaisir, que j’en suis fière ? Te fous pas de ma gueule, Mars. Je pensais que tu me connaissais un peu mieux que ça. »

Elle est partagée. Entre l’envie de lui sauter dessus, et l’envie de partir en courant.

« Alors putain. Laisse-moi tranquille. J’ai jamais voulu vous faire du mal. Ni à toi, ni à Kiana, ni à Andy. »

Et tout le monde lui saute dessus. Elle n’en peut plus.