Ses talons s’enfoncent dans l’herbe alors que Lucrèce s’avance entre les nombreuses constructions. La plupart viennent de sortir de terre, complètement éventrées, à la merci des éléments. D’autres n’ont que des fondations, des bases de sable.
Alors que dans ce là-haut de ruines un tel ouvrage aurait mis des années à sortir de terre, cette ville-ci n’apparaîtrait probablement que dans quelques mois. Les cristaux ont cette magie de tout accélérer.

Nouvelle architecte du continent, Lucrèce n’avait pu avoir les plus gros contrats qui lui faisaient maintenant de l’œil. Cependant, en bonne mondaine, elle avait réussi à décrocher certaines juteuses affaires auprès de richissime particuliers (ses connexions à Hélianthe ne sont peut-être pas étrangères à cet engouement autours de son art). Les demandes étaient arrivées à ne plus s’avoir qu’en faire ; la plongeant dans une masse de travail dont elle n’avait décidément plus l’habitude.

Derrière elle, une dizaine de personne se presse alors qu’elle marche sans s’arrêter vers son prochain chantier. C’est qu’elle à dû recruter pour faire face à cette nouvelle demande ; ambitieuse femme d’affaires qu’est Lucrèce.
Avant de commencer à arpenter ses chantiers, l’architecte aurait dû attendre l’envoyé de Célestia pour commencer à élaborer les plans. Encore une histoire de papiers, dont elle ne s’était pas souciée puisque de toute façon, cet envoyé n’était jamais arrivé
Elle n’a pas la patience d’attendre Lucrèce, son temps est précieux.

Et voilà que l’un de ces moutons qui la suit sans même réfléchir vient soudainement l’arrêter. Oh, qu’entendait-elle, l’attachée serait enfin arrivée ? Voilà qui lui complique la tâche, elle qui pensait pouvoir arpenter le champs de construction à son aise. Lucrèce lâche un soupire, espérant que cette histoire de papier ne soit pas plus qu’une livraison de documents. Il ne pouvait en être autrement n’est-ce pas ?

Dans toute sa splendeur de bourgeoise déjà ennuyée de la situation, Lucrèce se retourne, engouffre dans le troupeau d’inutiles employés fraîchement recrutés pour aller retrouver cette nouvelle interlocutrice. Elle a ce chapeau de paille qu’elle tient d’une main alors que sa robe blanche voltige au vent. Quel mistral dans les plaines.

« Darling, je suis honorée que vous nous faisiez enfin honneur de votre présence, c’est que je m’ennuyais sans ces papiers que vous devez avoir » à délivrer, approuver
peut-être ?

Elle lance cette phrase en sortant de la masse d’employé qui lui barre le passage, sans même apercevoir ce nouveau visage. Il ne devrait, de toute façon, pas être très redoutable.

Depuis qu'elle a mit un pied en dehors du lit, Nina est de très mauvaise humeur. Son réveille n'a pas sonné ce matin alors elle est arrivée en retard en cours. Et quel ne fut pas la surprise de la jeune fille quand on leur annonça que l'après midi ils iraient chacun travailler auprès de personnes dans tout Celestia. Et tout ça tiré au sort bien entendu, pas de choix possible. Comme de fait exprès, Nina se retrouve sur le terrain de construction d'Australis. Quoi de plus barbant !

Mais elle est bien obligée d'y aller, elle préfère aller faire la tête là-bas que de devoir rendre un devoir supplémentaire.

Mais c'est grand et des travaux il n'y en a pas qu'un. Alors elle demande son chemin avec sa bouille d'ange, elle doit se rendre auprès de Lucrèce du royaume de Caer Hrid. Evidemment, elle est en retard et en chemin on lui a donné des papiers à lui faire parvenir. Et lorsqu'elle l'aperçoit, ses gênes de vipère ne tiennent plus en place. Surtout que sa manière de parler .... Elle a envie de lui rire au nez mais elle reste sage Nina, lui offre son plus joli sourire et lui tend les papiers.

« Bonjour. Mmh. Je suis Nina, désolée l'école ne m'avait pas donné de cartes pour me repérer ici et c'est plutôt grand. »

Débarrassée des papiers elle croise les bras dans son dos et plisse les yeux. Ce visage lui dit quelque chose c'est assez étrange. Ça l'empêche même de penser à la prochaine blague qu'elle va faire.

« Vous êtes déjà venue à Celestia ? »

Elle ne prend pas de gants Nina, elle pose les questions qui lui viennent sans se départir de sa petite bouille qu'on a envie d'embrasser. Et puis la question est légitime de son point de vue. Eh oui ! Si Nina n'est jamais allée à Caer Hrid comment elle connaîtrait la femme en face d'elle ? C'est forcément que Lucrèce a déjà posé les pieds à Celestia.

Pourtant, plus elle la regarde plus elle se sent mal à l'aise. Eh ! Nina mal à l'aise, on aura tout vu.

Il y a une certaine perplexité qui apparaît sur son visage une fois les moutons dépassés (bousculés). Diantre, que faisait donc une enfant dans un tel lieu, les papiers à la main, l’innocence même sur son visage ? C’est qu’elle ne s’est pas encore rendu compte de la dureté d’Althea, Lucrèce, elle ne sait pas que certains jeunes peuvent travailler. Pas plus qu’elle ne se doute que certains reprennent le chemin de l’école.

C’est d’ailleurs sur ce mot qu’elle butte. Quelle embûche était-ce là. « L’é… cole ? » Son sourcil s’est levé, dans cet habituel magnitude d’hébétude.
Elle lève le document à hauteur de ses yeux, le lit rapidement. L’école ? Il n’y avait aucune mention de celle-ci dans ce document. Pas plus que dans les autres documents reçus à son bureau les dernières semaines (elle ne se souvenait pas de cette case cochée à l’ambassade lors de la demande de son visa, et à peine plus de ce professeur passé la voir à son hôtel Celestien il y a peu).

« Jeune fille, il doit y avoir erreur, je n’ai pour par habitude de… » l’un de ses seconds arrive à la couper (n’aurait d’habitude jamais osé) en tirant une deuxième feuille du tas de papier que Lucrèce tient à la main. Là, c’est écrit noir sur blanc. Notation de Nina.

Il n’y a qu’un soupire qui accueille cette nouvelle. C’est que Lucrèce n’aime l’improvisation que quand c’est elle qui déplace les pièces. Oh, elle n’est pas enchantée ; ne peut pourtant pas l’éviter si son visa de travail en dépendait.

Ses yeux passent du papier à la nouvelle venue. De la nouvelle venue au papier. « Nina de Célestia, donc ? » c’est curieux, ce nom qu’elle a déjà entendu, ces traits qui lui sont familiers. Elle n’a pourtant pas la volonté de chercher ; doit déjà absorber l’information. « J’espère que tu aimes les briques et le sable, Sweetie » car elle, elle les adorait. Peut-être arriverait-elle à la faire fuir ?

Elle pense déjà pouvoir repartir, cette architecte aux pas pressés, déjà tournée vers le chantier. Les nouveaux venus mènent pourtant la cadence. Singulière question que prononcée. « Je ne crois pas avoir encore eu ce plaisirs, le soleil est bien plus aimable avec ma peau que le froid polaire. » Elle donnerait milles montagnes pour un seul petit rayon de soleil.

« Allons donc, pressons, pressons, nous devons encore aller inspecter une dizaine de terrains. » toujours de la partie?

Elle semble bien pressée cette jeune dame et comme elle s'en doutait, Lucrèce n'est pas prête à la recevoir aujourd'hui. Et Nina ne peut que s'en frotter les mains. Un adulte déboussolé est bien plus facile à manipuler qu'une pimbêche sûre d'elle. Et pourtant elle se reprend vite et bientôt l'architecte arrive à lui faire lever les yeux au ciel avec sa phrase ponctuée par un Sweetie. Elle l'a fait alors que la femme ne regardait pas mais au delà de son malaise, elle ne l'aime déjà pas. Il ne lui en faut pas beaucoup à Nina et elle imagine encore plus de moyens de lui nuire sans qu'elle ne s'en rende compte.

Mais de toute évidence elles ne se sont pas rencontrées ici. Alors comment expliquer ce visage qui la rend méfiante ?

« J'adooore me salir les mains, Madame. »

Elle appuie sur son dernier mot avec un sourire des plus angélique et se met en route à la suite de Lucrèce. Elle observe un peu partout et les nombreuses personnes vont lui compliquer la tâche. On ne doit surtout pas la voir rajouter du sel dans son café ou perdre des documents qui doivent lui être importants. Mais Nina sait être patiente, il lui faut juste le bon moment, le bon timing.

« Oh vous savez le froid ça donne bonne mine ! Ça ressert les pores et puis ça permet d'avoir une peau plus ferme. »

Nina imagine tous les adultes avec des rides et des cheveux blancs, une petite pique cachée la rend toujours de bonne humeur et cette fois-ci son sourire n'est pas joué. Son rire non plus mais pourrait être interprété comme de la moquerie ... Pourtant Nina est simplement une jeune fille de bonne humeur, ça se voit non ?

Mais bientôt sa bonne humeur s'évapore et elle est obligée de jouer son rôle. Il va lui falloir marcher encore longtemps ? Elle déteste ça, vraiment !

« Il consiste en quoi votre travail Madame ? Que je prenne un peu de notes pour mon rapport. »

Un autre sourire, qu'elle perd sitôt le visage de Lucrèce détourné du sien. Nina doit la mettre dans sa poche.

Étonnante jeune fille qu’est cette Nina. Le sable et la poussière ne l’effraient pas comme cela aurait dû. Ou peut-être feint-elle cette nouvelle passion ? Il n’y a après tout que peu de personnes qui aiment réellement se salir. Si ce n’était pas pour l’art, probablement que Lucrèce ne le ferait même pas.

Elles passent devant quelques maisons esseulées avant que Nina ne reprenne la parole. Une attaque, plutôt bien dissimulée ; mais qui n’échappe pas à la reine des piques.

Et pourtant, Lucrèce ne relève même pas cette remarque. Il n’y a pas moquerie, simplement un petit ange derrière celle-ci, alors pourquoi s’en offusquer ? Elle n’a de toute façon pas le temps, ses nombreux chantiers l’attendent tels des enfants prêts à grandir. C’est d’ailleurs tout comme, seul instinct maternel qu’elle ait vraiment.

« Heureusement que les Méditerranéens n’en ont pas besoin n’est-il pas ? »

Oh, non, elle n’avait pas le temps de s’énerver. Pas le temps de rentrer dans ce jeu qu’elle affectionne pourtant d’habitude tant. Oh non, elle n’a plus le temps avec tout ce travail. Les délais sont serrés. La charge monumentale. Elle en ressent presque une pointe de stress. D’excitation, plutôt. Après tout, elle s’appelle Lucrèce.

Que c’est ennuyant, de traîner quelqu’un derrière soi. Quelle idée, vraiment.
« J’imagine les maisons. Les belles maisons, attention. » Elle n’a pas non plus le temps d’être bavarde. Pas l’envie, aussi. « Ah, enfaîte, je dois te noter à la fin de la journée. » N’en a pourtant pas grande chose à faire. Peut-être rendrait-elle même le papier vierge.

Les voilà arrivées devant leur première œuvre. Une superbe villa dans le style art nouveau qu’un client lui avait commandé. Il n’y a que les fondations, ancrées dans le sol, et quelques travailleurs déjà penchés sur le reste du chantier.

Lucrèce s’arrête enfin, laisse ses employés aller prendre les différentes mesures requises tandis qu’elle se tourne, réellement pour la première fois, vers Nina.
C’est étrange, cette sensation qu’elle a en la détaillant. Encore plus étrange ces cheveux jais qu’elle pense connaître sans mettre de nom. Elle s’en rapproche, de cette chevelure ébène dont ses yeux ne peuvent se détacher. « Ton prénom, tu as dis que c’était ? » Son ton est plus brusque, plus sec. Ses souvenirs ne suivent pas mais son cœur en palpite. Lui semble la reconnaître, en battant dans sa poitrine.

Lucrèce n'accroche pas et Nina grince des dents. Serait-elle le genre d'adultes à ne pas faire attention aux autres et leurs paroles ? Ou n'a-t-elle pas voulu voir les paroles cachées derrière ton sourire mielleux ? Qu'importe, ce n'était qu'une mise en bouche, la petite peste a bien plus d'un tour dans son sac. Mais Nina sait qu'elle doit rendre ses papiers remplis pour garder ses notes au plus haut et ce n'est pas avec les peu de mots que la femme daigne lui servir qu'elle va pouvoir faire quelque chose. Nina à l'impression de redevenir enfant et elle fronce les sourcils. Elle sait en quoi consiste son métier, la prend-t-elle pour une imbécile ?

Lucrèce se retourne et la jeune peint son sourire sur ses lèvres de vipère.

« Nina. »

Elle se retient de demander si elle a la mémoire courte, de justesse. A vrai dire, maintenant qu'elle la regarde de face, Nina a des sueurs froides, les mêmes que lorsqu'elle pense au passé. Elle repousse ce sentiment dérangeant dans un coin de son esprit et secoue sa tignasse pour reprendre contenance et se tourne vers les fondations de la future maison. Elle se perd un peu, imagine ses frères dans la maison, les cris de joie et les peintures de son aîné sur les murs.

« Fabricio aurait adoré donner des couleurs à ces murs dénudés. »

Elle soupire et maudit la blonde qui lui a rappelé les fantômes de son passé. Elle frémit et fronce les sourcils, la colère n'est pas loin mais malheureusement Nina se doit de tenir son rôle.

« Vous auriez fait une bonne équipe avec mon frère, il rendait les maisons encore plus belles. Bien qu'elles soient déjà très belles, surtout celles qui sont terminées à vrai dire. »

Elle se tourne à demi vers Lucrèce, la petite a perdu de son mordant, elle n'arrive même pas à organiser ses pensées.

Lucrèce a toujours ce regard un peu perdu fixé sur la chevelure ébène.
Nina.
C’est drôle, comme ce nom lui dit quelque chose. Aurait-elle pu la croiser dans Althea auparavant ? Elle n’est pourtant pas tombée depuis bien longtemps.
Sur terre peut-être ?
Il aurait fallut une chance exceptionnelle.
Mais pourquoi pas, après tout ? Il y avait bien eu Sasha et Orazio.

« D’où… »

Mais la jeune fille est plus rapide qu’elle, lui vole son souffle avant même qu’elle ne finisse sa question.
D’où viens-tu, là-haut ? Aurait-elle aimé demander, avant que les souvenirs ne lui reviennent.
Ils avaient de si beaux cheveux jais, alors qu’ils riaient tous les deux aux éclats en Espagne.
De si beaux sourires, quand ils se regardaient complices.
Fabricio et Nina. Nina et Fabricio.

C’est drôle de se sentir ainsi démuni devant une simple gamine.
Même les mots se sont perdus dans son esprit.

« Nina. »

Il y a une certaine tendresse dans ce nom qu’elle prononce.
Et des gestes maladroits alors que Lucrèce prend la petite dans ses bras.

Ses grands airs ne sont plus, elle n’est qu’une simple dame, démunie devant les promesses de la vie, interdite devant des souvenirs enfouis.

« Tu as raison, c’était un très bon architecte. Un des meilleurs. »

Elle a la voix qui tremble, un peu.
C’était.
C’était un très bon ami.

Lorsque la femme souffle encore son nom, elle se tourne de nouveau vers elle, un sourcils haussé. Faut-il qu'elle lui répète une nouvelle fois ? Elle ouvre la bouche mais Lucrèce ne lui en laisse pas le temps. La voilà dans les bras de la belle dame, ses cheveux lui chatouillant le nez. Alors ça, elle ne s'y attendait pas, si bien qu'elle reste les bras ballant, un instant. Puis au son de la voix de Lucrèce, elle tremble un peu. Elle se recule avec l'incompréhension sur le visage et le cœur affolé. Nina ne l'a pas repoussée avec l'énergie qui la caractérise, elle a fait attention à ne pas la blesser, pourquoi donc ?

« Comment ...? »

Elle ne sait même pas comment poser une telle question.

« Vous me prenez pour une enfant ? je ne vais pas pleurer vous savez. Par contre je crois que vous avez une poussière dans l'œil. »

Elle détourne son regard, mal à l'aise. Elle est certaine que l'architecte a parlé de son frère comme si elle le connaissait. Est-ce que ce serait possible ?

« Fabricio ... Il était connu vous savez ? Enfin je crois, connu des autres j'imagine ? »

Le sens de sa phrase la frappe en même temps qu'elle la prononce. Et si Lucrèce ... ? Son regard foncé se dirige de nouveau vers la rose, un quelque chose au fond des yeux. De l'espoir ? Oh c'est bien de l'espoir qui fait battre son petit coeur.

Elle aurait envie de se baisser pour lui ébouriffer les cheveux, la grande Lucrèce aux manières effrontées. Mais Nina n’est plus une enfant. Pas plus qu’elle n’apprécie un contact aussi soudain, puisque la voilà qui s’en va déjà.

Et Lucrèce ne sait trop que répondre. Ne sait comment réagir. C’est un souvenir qu’elle ne s’attendait pas à retrouver ici. Pas après toutes ces années. Pas aussi grandi et fière que Nina.
Oh combien d’années leur avait-on volés pour qu’elles se retrouvent ainsi vieillies ?

Ses mains viennent tapoter des joues si coquettement teintées de rose. Elle, avoir une poussière dans l’œil ? Quelle idée, oh non non non elle était immunisée à tout ça. De ce qu’elle croyait.

« C’est une poussière un peu trop douloureuse. »
Elle ne s’en cache pas, l’italienne. N’en a pas la force, pas le courage, met simplement les formes. Elle est toute démunie face à cette grande enfant, fratrie de ce qui avait été l’un de ses meilleurs amis.

« Il avait un avenir splendide. Et je ne doute pas que sa sœur marche sur ses pas. »

Nostalgie péniblement dissimulée.
Elle se rapproche à nouveau de Nina, prend le visage de celle-ci avec ses deux mains.

« Laisse-moi t’admirer un peu… qu’est ce que tu as grandis Nina, tu étais si jeune la dernière fois. » Aurait envie de la faire tournoyer pour l’admirer un peu plus.

Nina n'est pas plus grande qu'elle ne l'aurait voulu. Et pas aussi forte que lorsqu'il s'agit de ses bêtises d'enfant. Petite fille aux grands yeux perdus. Le visage de Lucrèce se fait un chemin à travers ses souvenirs. Et ça explose, c'est douloureux et ça fait mal. Comme ça brûle, encore plus que lorsqu'elle s'est brûlé la paume. Le feu dans son cœur consume ses dernières défenses et voilà la petite qui retient un sanglot. Son visage est flou, elle était si jeune. Mais sa voix lui rappelle son frère. Et avec lui les souvenirs qui font mal.

« Ils sont restés dans la maison ... La maison qui brûle. »

Ses autres frères, ceux qui n'ont pas échappé aux flammes. Nina espère toujours de toutes ses forces que Fabricio a eu plus de chances qu'eux. Après tout il n'était pas là quand les méchants ont embrasé son paradis.

« Ils sont ... »

Ses larmes coulent et l'empêchent de terminer ses phrases. Mots qui jamais n'avaient franchis le bout de ses lèvres. Alors elle s'en rend compte, arrache les mains de Lucrèce de ses joues et sanglote en lui tournant le dos. Mais c'est dur de devoir faire face à toute cette douleur qui dévale son cœur jusque sur ses cils. Si celle-ci est bien la Lulu de ses souvenirs ça devrait aller ?

Nina ferme les poings, ferme les yeux et se jette dans les bras de la femme en pleurant sans pouvoir s'arrêter. Elle mouille sa jolie robe, ça lui apprendra à la faire pleurer. Avec un peu de chance elle aura assez de larmes pour faire une grande trace ! Ca lui apprendra ...