c’était un soir ((doux)) de sa fraîcheur mordante
la peau ;
il y a quelques
volutes de fumées qui
viennent s’élever
le long des
villas ;

ah c’était là son royaume
territoire des privilégiés ;
gardien des entrées
des trésors
des vies des entités.

pourtant il n’y a d’effrayant
que la couleur froide de ses yeux ;
lueur effilée au fond des rétines
si matérialité elle composait.

mais voilà ;
les nuits d’hiver sont ennuyeuses
car les neiges ont quelques goûts de splendeur
avant de fondre de désintérêt
pour les frivolités de ce bas-monde.

quelques autres secondes
((celle d’eau fondue dans la paume))
semblait porter plus d’intérêt c’était
un éternel de jouvence dans une seconde de conscience.

mais voilà ;
c’est que neige boude bien ce royaume
alors il n’y a que la fontaine pour s’écouler
de son doux clapotis ((murmures des plus funestes))
dans les noirceurs de minuit.

ah mais hélianthe
a plaisante compagnie des
les soirs tard
c’était quelque ambroisie
pour tromper l’ennui.

debout de sa haute stature
quelques parures sur sa tenue de
((prince des quatre chemins)) ;
astre qui illuminerait bien son chemin ((c’est
toujours une éclipse qui lui tend la main)).

l’horizon a bien des infinis dans la pénombre,
mais les pas ont des résonnances qui n’échappent pas à
ses sens.

alors hélianthe maître de ces hautes luxueuses structures d’argent
a un sourire qui franchit ses lèvres finement étirées ;

« bonsoir cher ami, vous êtes tout aussi loup de minuit que notre insomnie. me feriez-vous l’honneur de venir me tenir compagnie ? »

ah définitivement ;
l’inconnu qui se glisse dans les ombres ses amies
n’était pas des villas –
l’adrénaline des jeux
de maître gardien et prince de ces sombres ambroisies là.

Il est (lame assassine, main clandestine) l'ombre qui se pare des ombres, dans les tournants des belles villas. Il a couteau dans la main, se déplace comme assassin, tout prêt à goûter à l'amante (la mort qui chaque fois l'embrasse de ses lèvres pleines avec un amour exquis). Mais les plans ne se déroulent toujours comme convenu. Alors il sait, quand il voit le serpent attendre la proie, que la sienne devra bien attendre quelques minutes de plus. Il n'en déchante pas, se doute bien qu'elle ne s'évadera pas (elle n'a aucune idée de ce qui l'attend dans ce royaume aux douces mains qu'est Onyx). Il cache la lame bientôt ensanglantée, la range bien contre ses reins et sourit avec aisance. C'est qu'il est tout naturel, même quand il n'a rien à faire là (ça se lit sur son visage, se lit dans ses pas). Mais il est amant de minuit, l'on ne se doutera de rien (en conjure à ses sens, le sait dans ses veines).

« Bien sûr, quel invité serais-je si je n'acceptais un verre au creux de la nuit, sous les rayons de lune? »

Alors s'approche de son altesse, c'est qu'il le voit dans sa carrure, ce n'est homme de tous les jours. Hélianthe est cet être bien dessiné, bien porté, bien droit, bien adroit. Il est homme de ces lieux, c'est certain, a de ces venins qui s'accordent avec la majesté. Mais Onyx rencontre des royautés tous les jours, c'est que la mort est plus souveraine du monde qu'Hélianthe est souverain de ces villas. Alors il n'est véritablement impressionné, s'installe, à ses côtés, croise les mains dans le dos. Il lève le menton vers le ciel, observe les étoiles pleines, celles qui n'ont rien à voir avec les lueurs de la vallée, et tourne le visage, curieux, vers l'homme à ses côtés.

« Quel serpent êtes-vous, pour rester éveillé en pleine nuit refroidie par les saisons soporifiques? »

c’est que l’invité (in)fortuné
a des pas assurés oh ;
((ceux des lames fines
des esprits discrets qui filent
le long des murs des rues des rêves des jeunes filles)) ;

c’était doucement ironique.

hélianthe apprécie sa réponse ;
c’est que son invitation ne se refuse ((que par un cygne indolent))
mais il attrapera toujours les plus beaux oiseaux en cage.

en attendant
celui-ci s’avance sagement
vers sa flûte de bon champagne tendu à son égard ah

ces bulles-là n’éclate que doucement
sur la langue délecte les palais les plus fins ;
l’inconnu sous la lune a pourtant l’air de goûts
aux raffinements bien connus.

c’est que sa majesté hausse un sourcil étonné ;
avait-il deviné ses écailles briller sous les rayons d’argent
ou avait-il simplement déduit de ses habiles manœuvres ?

peu importe le cas véridique
celui-là était loin d’être ordinaire
((mais hélianthe préférait l’avoir à ses côtés
plutôt que perdu dans les ombres de ses villas
son royaume son trône adoré)).

« les nuits sont longues lorsque
les ombres sont compagnies aux heures éveillées. »

la réponse est indirecte ;
n’a pour but de réellement assouvir sa curiosité car
c’était lui plus que prince des villas
aux anneaux qui glissent dans les noirceurs de ces hauts murs.

« et quelle est votre étrange envie, de visiter ce royaume-là aux coups de minuit ? »

les dés sont lancés ;
c’était une douce partie aux goûts d’un champagne sucré qui s’annonçait
car ses ambres sont déjà plantées dans les siennes ((belles opales brillant
aux rythmes de la lune maternelle dans les cieux lointains)) ;

les secrets n’ont de façade pour ses sifflements.

Onyx n'a rien d'un visiteur habituel. Il a les desseins bien différents qu'il ne le laisse imaginer, a les doigts graciles, la peau glacée (comme celle de la mort qui vient sévir). Car il a la lame près du corps, près du cœur, toute prête à trancher la peau, à empoisonner les sens. Il a les mains volupté pour calmer les grondements, la voix douce pour apaiser les tourments. Il vient ôter la vie, Onyx, il vient en amant de minuit pour guider les morts dans un meilleur paradis.

« Je viens rejoindre une vieille amante. »

Il ne ment pas vraiment, n'en avait pas l'occasion. C'est qu'il en est persuadé, il aurait dit la vérité, même s'il n'avait senti sa langue se délier d'elle-même. Alors il sourit, vient tendre le verre que l'on lui offre pour faire trinquer les flûtes, les faire sonner en doux carillons agréables. Ce sera l'hymne aux amitiés de minuit, bien qu'elles soient incongrues, qu'elles fassent chanter. Onyx se fait un peu curieux, face à ce roi, le regarde de biais et admire sa droiture. C'est qu'il est beau, et fort, face au clair de lune. Il a de ces profils qui font un peu rêver (de ces nez reptiliens, de ces yeux sombres et charmants), qui ont tout dans l'élégance et la volupté. Il lui rappelle les jolies statues de marbre que l'on affiche aux entrées de musée, y aurait bien sa place, Hélianthe.

« Ces jardins ont des splendeurs surprenantes, aux alentours de minuit. »

Parle-t-il des jolies fleurs, ou du beau prince en qui il a trouvé compagnie? Rien n'est certain. Aussi ajoute-t-il avec plus d'aisance :

« Peut-être tiennent-ils de leur propriétaire. »

Oh, il a le sourire des personnes qui charment sans arrière-pensées. C'est anodin, ce n'est fait exprès, vraiment, regarde ses jolies dents, Hélianthe. Il n'a rien de ces dindes qui gloussent pour quelques courbettes, après tout, ne sait exactement à qui il parle véritablement.

mais onyx chante les louanges
des secrets de ses anges
((au fin fond des villas)) ;
c’est voilé de pudeur
sous les rayons de lune d’argent.

hélianthe ne questionne pas plus car
ce qui se passe entre les murs
ne le regarde pas
de volupté ou de mort si elle
lui offrait une nuit de sensualité)).

onyx a ces mots poétiques
qui s’enfoncent
cryptiques
dans les noirceurs de leur nuit.

mais onyx est aussi
flatteur
joueur ;
sourire en coin
sourire des rois
ah,
il ne disait jamais non aux flatteries.

« oh ; elles ont bien de leurs propres splendeurs. »

car
baignées de vif-argent
ces raretés ont bien leur somptuaires parées de moires
elles fascinent
elles séduisent
déjà.

((oh peut-être bien qu’elles
tiennent tel charisme de leur propriétaire)) ;

mais hélianthe
n’a de flatteries pour lui-même

onyx a de la déférence que son charme en cadence ;
et hélianthe
ça ne lui déplaît pas car
il a ces jeux-là des majestés
de ces hérésies
qui hantent les villas.

« elles n’en sont que plus sublimées, aujourd’hui
en douce compagnie. »

car onyx pourrait bien figurer
sur ces statues de marbre gravées ;
la furtivité gravée dans ses opales malignes
mais
c’est bien là l’essence des hermès.

hélianthe soupire ;

« nous trouvons bien dommage que les plus belles secondes
s’écoulent en rapides bulles autour d’une fontaine sans retour. »

car,
doux serpent le sait ;
dans les déboires de ce royaume avide.

Onyx sourit presque avec candeur au roi des villas. Oh, s'ils sont deux à jouer au jeu de beaux mots, il faudra bien faire compétition afin de définir qui gagnera, c'est certain. Mais il se contente d'accepter le doux roucoulement en glissant un regard enamouré aux fleurs de ces jardins. Si elles ont leur propre charme, il ne peut s'empêcher de penser que c'est parce qu'on les a domptés, c'est forcé. Alors sous les lueurs de minuit, peut-être ne se trouve-t-il aussi joli, oui, que ces beautés en fleurs, l'admet.

« C'est car les rayons de la lune épousent les chevelures d'argent, plus que celles de bronze ou d'or. »

Car cheveux blancs au clair de lune résonnent en amant, résonnent en ange aux douces ailes (magnificence, ne dirait-on pas). Il rit avec douceur face au charmant commentaire et savoure, lui, le fond de son verre, quelques secondes seulement après son altesse de ces lieux.

« Oh, enfin, nous savons tous deux que si le temps était immortel, vous vous lasseriez bien vite de ma présence. Heureusement qu'il file, ainsi, notre prochaine rencontre (si elle a lieu) n'en sera que plus fortuite. »

Et ainsi, les coupes sont vidées. Ainsi, il est bien heureux (bien vaillant) de pouvoir la déposer sur le bord des fontaines dans une valse de doigts qui n'a de surprenant que leur dextérité (de ceux habitués à serrer les gorges et à égorger). Mais s'il touche le bras du serpent ce soir, il veillera à ne le frôler que du bout des doigts, loin de cette main de laquelle il tue, ne voudrait abîmer la splendeur immaculée de sa majesté.

« Cette fontaine, au moins, rappelle la vie de ce temps qui est trop vite parti. »

Car la mort ne les rattrapera pas, eux deux, ce soir, non. Elle sera occupée plus loin à embrasser sa nouvelle proie, Onyx le sait, a le couteau qui plante contre son dos, à l'abri des regards.

« Merci d'avoir assassiné le temps à mes côtés. »

les gouttes s’épuisent ;
les flûtes bien vides
cristal contre pierre
de ce magnifique jardin

et la lune continue à les faire résonner
de son halo argenté ; à sa parure de sombres reflets.

c’est qu’il a de jolis mots ;
qui enchantent ses oreilles car
ainsi lui chanter des vérités
autour d’une fontaine
sous les rayons de minuit.

alors ;
il l’entend bien
mais hélianthe ne peut laisser ainsi
entrer quelqu’un dans ses villas ;

ils ne sont pas (encore) amis.

« racontez-nous un peu ; ce qui vous attire tant chez cette amante. »

car il l’était ; curieux
des mystères qui se trament dans les murs de son royaume
de ces fleurs qui transitent de leurs raretés par ses mains
par son amour qu’il leur déverse pour mieux les bouturer
et pavaner sa couronne dans les cours de glace
sur son trône bien froid.

c’est qu’hélianthe a une main ferme
posée sur l’épaule de celui qui,
voulait bien son laissez-passer
((car lui n’avait pas peur
de se tâcher d’un peu de carmin sur les paumes
pour y garder sa compagnie un peu plus sienne))

les nuits des villas sont pourtant bien solitaires.

Ce qui l'attire, chez sa tendre amante? Oh, il songe, songe, fait glisser les doigts autour du cristal du verre avec une moue pensive, là, tout sur le joli minois. Hm; il n'y a jamais véritablement songé, oui, est tout prêt à en faire la liste.

« C'est que ses jolies mains cherchent toujours, sans cesse, à s'accrocher sans remords, à s'agripper jusqu'à posséder tout entier celui qu'elle aime tant. Elle a les baisers ardents de ceux qui cherchent à ne plus lâcher la peau. Elle a les paroles en regards mornes expressifs, elle a l'amour en folies et les possessions immortelles. Elle est fabuleuse et terrifiantes, vous savez. Je ne sais si je l'adore ou la crains. Peut-être les deux, tout à la fois. »

Il tourne le regard vers le prince des lieux, se demande s'il comprend ses tourments, ses ardeurs. Il veut savoir s'il est comme lui, Hélianthe, s'il rêve de quelques amours en folies et mains dérisoires. Car s'il a des amants à en défiler, maintenant, c'est qu'elle, elle ne le quitte jamais, non. Elle glace la peau où que l'on aille, elle saisit les corps et les dévore (ardente passion sans fin sans loi).

« Le connaissez vous, cet amour là? »

et son invité
lui récite la beauté de son amante ;
le détient ((un peu))
auprès de sa passion ;

et c’est qu’elle a l’air si belle cette amante
si belle si merveilleuse si
intenable ;
car elle a des passions qui ravagent ((le cœur des plus aimants)).

mais hélianthe lui
a la royauté qui coule
dans les regrets qu’il avait laissés
sur terre et puis là
un goût un peu amer qu’il renferme dans son cœur
a double-tour la clé
sous les tapis sous les oreilles loin
de ses tourments pour mieux l’y sommeiller.

la flûte en équilibre,
c’était dangereux pour des pierres précieuses
gravées dans l’esprit.

« non,
nous ne la connaissons point. »

et il y a
une teinte de mélancolie dans sa voix ;
fondre la glace des majestés dont il se pare sans désirer
plus approfondir ses remords.

« le nôtre est… »

car il ne cache pas que c’est un amant qu’il a ;
car l’insomnie est passée au second degré de ses passions
comme il la fuit oh peut-être bien
que c’était elle qui l’effrayait ;

« le mien est magnifique ; comme un soleil mais qui se couche sur la douceur de ses reflets. il y a quelques brûlûres sur la surface ((que nous lui avions
infligées ; car
nous sommes les mensonges sous les nécessités)). »

hélianthe a perdu son regard d’or dans les décombres des nuages ;
il n’y a plus que lui
son étrange invité ;

car il n’a pas besoin de le préciser ((n’est-ce pas)) ;
avait bien deviné que l’inconnu (son ami ?) qui se tenait ainsi
près de lui pour une éphémère compagnie

« mais il est revenu, le croyez-vous donc ? qu’un soleil qui s’est éclipsé les ailes fondues ; redescende vous trouver pour encore plus vous aimer. »

en vérité ; hélianthe a
un peu de frayeur dans sa voix
mais de ses propres choix.

« c’est que notre amant a eu de longues attentes ; c’était comme
la renaissance en soleil unique qui soudain
brûle vos ombres votre nuit
qui vous berçait de ses mains sans chaleur. »

encore une pause ;
pourquoi racontait-il ainsi
à un papillon de nuit ?

« et comment êtes-vous censé lui raconter des années écoulées
à se hausser sur les hauts palliers d’un styx enragé ? »

secoue la tête ; ses longs cheveux de jais ont quelques tempêtes qui se soulèvent
un soupir parmi ses plaintes.

« c’est bien difficile ; de retrouver l’astre du jour quand la lune est devenue votre seule amie. »

peut-être comprendrait-il ;
ou peut-être pas
pour leur voler le cœur et le garder ((au chaud)) entre leurs mains.

Oh, Hélianthe ne connaît cet amour-là, et c'est tant mieux pour lui. Onyx ne réclamait ces folies là à personne d'autre (qu'à lui). Car l'on n'aimerait côtoyer la mort qu'avec la nuque tendue toute entière en pâture (en espérant que jamais elle ne frappe).

Mais l'amant d'Hélianthe se dessine en chansons, et Onyx écoute, Onyx entend. C'est qu'il se demande, un instant, s'il y a plus merveilleux que les romances difficiles, que celles qui émettent des doutes et qui torturent l'âme. Car Hélianthe décrit les doutes comme l'on décrirait des tourments, et Onyx ne peut que comprendre : les amours dans la vie, on ces goûts acides sur la langue (qui rappellent les pires et meilleurs souvenirs d'une existence).

« Je pense que vôtre amour est plus fascinant encore que le mien. »

Car il s'imagine l'icare en adoration face à un homme dont il ne connaît plus rien, et se demande, oui, s'il y a amour plus pur, s'il y a affection plus douce. Il songe, un instant, s'il y a les douleurs qui resurgissent parfois dans les poitrines de ceux qui hésitent trop (lui attaque les cœurs et les corps sans remords).

« Il n'y a rien de plus blessant que de laisser les informations voler aux oreilles de ceux qui importent, sans juger bon d'en informer le principal intéressé, vous ne croyez pas? » Il marque une petite pause, tourne le regard sympathique vers son nouveau roi et sourit avec les charmes enchanteurs. « Je pense que les fiertés n'ont lieu d'être, quand les coeurs s'embrasent. Parfois, pour goûter aux passions, n'est-il pas nécessaire de se laisser enflammer tout entier? Si les déceptions sont nombreuses, il faut s'y accrocher pour mieux capturer les cœurs, les lèvres, des êtres désirés. »

Quel romantique il fait, au clair de lune, Onyx. Il songe, songe, et observe cet astre blond qui les observe, debout en abandons.

« Il n'est pas impossible de côtoyer le soleil, si l'on est prêt à y perdre quelques ailes. »

Comme Icare, lorsqu'il s'envolera trop près de celui-ci (pour en faire fondre la cire (pour en mourir)).