Ils rentraient, sous le soleil éreintant. Ils rentraient, entre les dunes de sable éternelles, chaussures pleines de grains, chaussures décharnées. Ils rentraient. Il ne savait trop pourquoi Azalée finissait souvent dans sa propre maison, depuis cette nuit là (celle où, ironiquement, elle avait failli détruire son chez-lui). Et tout allait bien, vraiment, ils parlaient peu, buvaient beaucoup, avaient fait une courte halte au campement des nomades pour que finalement la jeune femme ne réclame la climatisation des pyramides. Et ça ne le dérangeait pas, Mars, de la laisser se prélasser chez lui. C’est que le loyer n’était pas si cher, c’est qu’il se sentait bien seul, là-bas, finalement. Mais la vie y était plus confortable, il avait l’électricité et de l’eau bien plus potable. C’était agréable, de retrouver un semblant de routine qu’il avait pu avoir sur Terre. Et là-bas, en plein désert, une boîte. Elle a la couleur des grains de sable, difficilement discernable, mais il la voit, alors il plisse les yeux, parle pour la première fois depuis de longues minutes.

« Là-bas. Il y a quelque chose. »

Et ils se rapprochent, Mars fait fi des quelconques commentaires que la jeune femme pourrait bien fournir. C’est qu’il est curieux, a toujours les yeux émerveillés devant de nouvelles découvertes. Il n’allait certainement pas laisser passer une boîte ainsi esseulée en plein désert, alors qu’il n’y a rien d’autre à des kilomètres à la ronde. Une fois devant celle-ci, il s’abaisse, il glisse les bras en son intérieur et en ressort une bête. Un chien, au poil couleur sable, au poil couleur brun. Malgré le fait qu’il s’agisse visiblement d’un bébé, ou en tout cas pas bien âgé, il pesait déjà son poids et Mars dû le coller contre son torse pour s’assurer qu’il ne le ferait pas tomber. L’animal ne poussa pas le moindre bruit, et, comprenant qu’il devait mourir de soif en plein soleil, il releva la tête vers Azalée, les yeux grands ouverts.

« Qui laisserait un animal mourir en plein désert ?»

Et glisse sa bouteille entre les babines de l’animal.

« Il va falloir qu’on le ramène, qu’on lui trouve un nouveau maître, peut-être. » Un regard vers la jeune femme, et, même s’il connaissait sa réponse, lui demanda : « Tu le veux, toi ? » C’est que le grand sourire au coin des lèvres ne trompe pas : il s’amuse bien, sait qu’entre chien et chat, la cohabitation serait bien difficile.

Mars rit un peu, s'attendait à cette réaction de la part du gros chat. Oui, oui, les chiens ça pue, ça prend de la place. Et un chat? Ca se fait roi de chez soi, ça s'installe bien, confortablement, ça lance des regards de dégoût à ce qui devrait être inférieur. Mais ce chiot là ne tremble même pas face à Azalée, alors il le garde contre son corps en le laissant s'abreuver avec autant de délicatesse que nécessaire.

« Sans cœur, va. »

Mais il le dit, le rire dans la voix. Ne le pense pas vraiment. C'est que la jeune femme se contente de se jouer reine, le sait, cache bien ses émotions. Alors il se redresse, garde l'animal entre ses bas, qui semble retrouver un semblant de vie, oui, tout contre lui.

« Eh bien, le destin est bien sympathique, puisque, ne t'en déplaise, je vais me charger de le ramener moi-même. »

Et ils se remettent en marche, ignore superbement la réaction de son amie, jusqu'à se retrouver enfin aux pyramides, plusieurs minutes de marche plus tard. Il laisse lourdement tomber son sac dans l'entrée du petit appartement qu'il s'était pris, après avoir retiré ses chaussures pleines de sable. Petite chambre/salon/salle à manger, petite cuisine, petite salle de bain. Rien de très luxueux, tout ce qu'il suffisait.

« Evite de mettre du sable partout. »

Il glisse ces quelques mots à Azalée, avant d'amener le canidé pour lui donner de quoi ce nourrir. Celui-ci avait déjà retrouvé un peu d'énergie, et, après s'être nourri de ce que lui offrait Mars, il se laissa tomber pour s'endormir aussitôt sous l'œil attentif de l'oublié, qui vint s'étaler sur son lit une fois cela fait.

« Il va vraiment falloir que je trouve quelqu'un pour s'occuper de lui. »

C'est que Mars est surprit par le ton employé. Pourquoi diable Azalée crache ainsi le venin d'entre ses lèvres? C'est qu'elle aussi, elle a été recueillie par la même main que ce pauvre chien, ne s'en rend-elle pas bien compte? Car Mars a de ces baumes qu'il applique sur les cœurs sans s'en rendre compte véritablement. Il a les doigts en fragilités, peut-être, les raisons envolées. C'est que le temps créer de nouveaux êtres, oui, et le garçon solitaire apprend à s'entourer (de chiens et chats sauvages).

« J'aurais certainement pas le temps, même si je le voulais. Mais problème réglé, j'ai jamais vraiment rêvé d'un chien. »

C'est qu'il en avait eu assez, de ces journées là-haut aux côtés de maman (de ces animaux que l'on ne comptait plus). Il se redresse pour se faire bon hôte, leur sert deux verres d'eau. Oui, il a pris le confort qu'on lui offrait dans ces belles pyramides, commence à entasser des choses comme il ne l'avait jamais fait auparavant dans cette tente un peu jamais sienne. C'est qu'il n'était plus matérialiste depuis tant d'années, déjà, mais voilà que quelques objets louches jonchaient des pauvres meubles (peut-être étaient-ce des cadeaux d'Orion, des découvertes de Rosario, des trouvailles d'autre part).

« Ca va être chien, jusqu'à ce que quelqu'un en décide autrement. Je te l'ai dit, je vais pas le garder. »

Même si, dans son coin, l'animal semble si doux, à ainsi souffler fort, ainsi laisser le sommeil combler ses pensées et ses rêves. Mars se demande s'il a jamais dormi aussi profondément (peut-être pas, depuis quelques temps).

« J'ai assez d'un chat à m'occuper. »

C'est qu'il lui envoie un petit sourire arrogant, un peu amusé (taquin). Oh, qui aurait pu prédire qu'Azalée serait la prochaine à mieux squatter ses appartements (l'amie qui mettait du baume sur ce cœur lui aussi déchiré par les trahisons (de Carmen)). Mais peut-être mettait-il un peu de retenue sur leur relation. Peut-être essayait-il de ne trop se laisser approcher par la douce tigresse, non. (Car lorsque l'on offre tout, on est démuni).

« Tu as faim? Je peux cuisiner un truc. »

Même s'il avait un peu perdu la main, depuis le temps.

Mars a un petit sourire, lorsqu’il l’entend rire. C’est que cela remplit le foyer, c’est que cela le rend plus vivant. Il n’y a pas beaucoup de place à combler, dans ce tout petit appartement, mais il y a le chien dans un coin, Azalée dans l’autre, et, finalement, il s’y sent bien (dans la chaleur de ce cocon qu’il se créer). C’est que les pyramides ont cette tendance étrange à faire résonner les bruits de pas, les rires, les hoquets. Et pourtant, tout semble un peu vide, tout semble un peu dénué de vie, finalement. Mais pas aujourd’hui.

« Je t’appelle chaton, ça revient au même, finalement. »

Il se moque un peu, arbore ce sourire légèrement taquin rien que pour énerver facilement ladite tigresse. C’est qu’elle ne l’appelle pas oiseau non plus (ce qui serait étrange). Il s’en va se dépêtrer dans toutes les affaires agglutinées dans la cuisine. C’est que c’est tout nouveau, c’est tout étrange, il n’a plus l’habitude d’avoir ses propres poêles et casseroles (n’en a d’ailleurs que deux). Alors il les pose et fouille dans le frigo qu’il a (quel luxe pour le désert). Il en sort des champignons, un pot de crème fraîche. A faim, mais ne mange jamais trop, Mars (peut-être par habitude, maintenant).

« Champignons à la crème. J’en ai trouvé, l’autre jour. » Pour ne pas dire qu’il en avait ramené de sa dernière visite chez Orion. « J’espère que cela va à ma reine. »

Il taquine, le sourire aux lèvres, mais se doute, en réalité, qu’elle ne se plaindrait de rien. C’est qu’il a bien la bonté de lui ouvrir sa porte (mais il l’aime bien, ne la virerait pas comme ça), alors elle ne lui ferait pas l’offense d’être sélective.

« Et je suis sérieux. Je ne vais pas le garder. Là, il prend rien comme place, mais dans un mois, il me volera mon lit. »

Il grogne un peu.