Orion s’était mis à courir vers la grande étendue bleue qui se perdait dans l’horizon : cela faisait si longtemps qu’il n’avait pas vu l’océan. « C’est par là ! Mars, regarde ! » Il ne se souvenait pas avoir eu ce plaisir d’enfant qu’était de courir les pieds nus dans le sable, s’élancer dans les vagues, faire des constructions et sertir les tours de sable mouillé de quartz et de coquillages. C’est à dire qu’il n’avait pas énormément de souvenirs de son enfance, en fait - encore cette histoire de tiroirs dans sa tête - et il avait fait un trait dessus. Il n’était pas là pour s’improviser l’enfant de six ans qu’il n’avait pas été, mais pour voir de ses deux yeux les mats brisés des vaisseaux éventrés - et possiblement, les reliques Althéennes qu’ils recelaient. « C’est tout à fait ce que j’imaginais ! »
En haut de la falaise bordée d'arbres encore dégarnis, le vent iodé soufflait bien plus fort, mais Orion ne s’en souciait pas. C’était un vent chaud malgré la saison - il écarta les bras avant de se tourner vers son compagnon de route : Mars.
Il avait repris du poil de la bête, Mars, et il avait retrouvé cet air qu’il avait toujours arboré. Toujours la même courbe de sa bouche, toujours le froncement de ses sourcils - à moins que ce ne soit le soleil - mais Orion n’oubliait pas ces facettes qu’il lui avait révélées ce soir là. Il aurait pu venir seul ici. Mais comment aurait-il pu, alors que son nouvel ami lui avait explicitement demandé de le contacter dès qu’il trouvait quelque chose qui pourrait répondre aux questions qui fourmillaient dans leurs deux têtes.

Un escalier menait jusqu’à la crique, serpentait doucement sur le flanc de la falaise pour que le chemin soit praticable. Orion s’empara de son holokit et ouvrit l’appli qu’il avait installé avant de venir : les prévisions de la marée. « On a de la chance, la marrée basse commence bientôt. On va pouvoir avoir accès à ces côtés là ! » Il désignait les coins extérieurs de la cuvette, là où la crique se transformait en océan. « Je suis sûr qu’il y a plein de choses dans ces épaves. Allons-y ! »
Et sans attendre l’Oublié, réajustant son sac à dos, il entama la descente des marches avec entrain. En même temps il continuait de parler, autant pour lui-même que pour Mars, même s’il ne vérifiait pas sa présence derrière lui. Il partait bille en tête. « Je pense qu’on devrait plutôt essayer celles qui sont plus difficiles d’accès, celles qui sont juste en face on déjà dû être visitées. Mais ça fait seulement cinq ans et la marée est instable, cette appli est nouvelle, donc on a des chances de trouver quelque chose ! D’ailleurs rappelle-moi de surveiller l’heure. »

Enfin, il mit les pieds sur le sable. L'air était agréablement tiède, le vent ne soufflait plus entre les murs naturels et l’eau était magnifique - il s’arrêta un instant pour prendre une photo. Puis un selfie : son visage en gros plan et Mars qui arrivait derrière. Quand il se retourna, Orion avait toujours son holokit en main, aussi radieux que le soleil qui sortait des fins nuages. « Mars, on part à la chasse aux trésors ! »

Il y avait dans la découverte d’un lieu inconnu quelque chose qui lui faisait ouvrir grand les yeux, un espèce de trac qui le prenait au ventre de la bonne façon et qui réclamait de lui qu’il se mette à courir. Oh parfois il se retrouvait dans des situations bien cocasses ; un orage déchirant soudainement le ciel au dessus d’une forêt, une roche peu stable bordant une falaise, la brume croissante ou la faim oubliée resurgissant soudainement. Aucune péripétie ne l’avait jamais arrêté, cependant, et aujourd’hui il se sentait le vent en poupe : il faisait magnifiquement beau, la plage était splendide, il avait des provisions dans son sac à dos, il était entouré de vestiges somptueux et surtout il avait un ami avec qui partager cette petite expédition.
Mieux encore : Mars arborait cet air détendu malgré les rafales de vent qui fouettaient son visage et le découvrait, tout l’opposé de l’autre jour. Dans sa posture et ses traits se lisait un apaisement qu’il ne lui avait jamais vu. Il avait vraiment bien fait de lui proposer ce voyage.

Ils avaient avancé sur le côté de la plage, où l’eau se jetait sur les rochers appuyés contre le falaise. C’était un clapotis encore doux, mais Orion n’avait aucun doute qu’une fois la marrée remontée, la moindre erreur pouvait être fatale. Il ne doutait pas, d’ailleurs, de leur prolongement dans l’eau et de la faible profondeur de cette dernière - sinon, pourquoi y aurait-il autant d’épaves ? Pas question, donc, de rejoindre les écumes, à moins d’avoir de la chance et de tomber dans un creux.
En revanche, il pouvait toujours faire ceci :

« Bonne idée, oui, » dit l’Astre sur le ton de la conversation, profitant que Mars ait pris les devant de la marche. Dans son dos, il se baissa pour plonger la main dans l’eau. Malgré le soleil, elle était toujours froide en cette fin février. Lorsque Mars se tourna vers lui, Orion eut toutes les raisons de mettre en action sa farce, un grand classique. Il s’était relevé entre temps, et en prenant appui sur son pouce, propulsa des gouttelettes d’eau de mer sur le visage de son ami à deux reprises avec ses doigts. Encore une fois, l’eau était froide. « Pour qui tu me prends ? Je te permets pas de remettre en doute mes capacités. » Puis, après avoir bien imprimé son expression dans sa mémoire (il avait des gouttelettes sur le nez et sur les joues), il prit la poudre d’escampette.
Il dépassa Mars pour faire de prudentes enjambées de rocher en rocher jusqu’à l’épave. Heureusement, la plupart étaient assez plats. (Orion se demanda alors s’il existait un cristal de Terraformation. Probablement pas.)
Le trajet fut plus facile que prévu. Peut-être avait-il de notables longues jambes ou peut-être avait-il l’habitude de ce genre de parcours, peut-être était-ce les deux. En tous les cas, Mars suivait bien lui aussi ! A plusieurs reprises, il dû s’appuyer contre la falaise pour mieux repartir, parfois il devait sauter avec vigilance - mais de manière générale, malgré quelques presques, tout se déroula très bien.

Ce qu’ils n’avaient probablement pas anticipé, c’est que le bateau était bien plus gros que prévu. Une fois devant la carcasse du bateau Orion se rendit compte d’une chose : il était un peu penché sur le côté, et atteindre le pont allait être compliqué. A moins que...
Quand Mars l’eut rejoint, Orion se tourna vers lui, un air angélique sur le visage et un sourire jusqu’aux oreilles, comme s’il ne l’avait pas aspergé d’eau glaciale une dizaine de minutes avant. « Tu me fais la courte échelle ? »

Une fois Mars gracieusement (non) remonté sur le bateau, Orion pris le temps de regarder les environs. Ce n’était pas un grand bâtiment - sans être un canot - et pendant un instant, Orion s’émerveilla de ce qu’il avait sous les yeux. De chaque côté du pont s’élevaient des marches, brisées pour certaines, et donnaient sur ce qui semblait être une barre brisée. De là, l’on devait avoir une superbe sur le mat cassé à la base et donc la tête et ce qui devait être un reste de voile baignaient dans les eaux tranquilles. Malheureusement, il n’y avait rien d’autre intéressant. C’est Mars qui découvrit un passage.

« Oooh bonne idée ! »

En retenant ses cheveux malmenés sur un côté de sa tête, l’Astre s’approcha du trou par lequel son ami s’était glissé, et une fois seul, se laissa aller à un sourire. Mars avait l’air aussi enthousiaste que lui. « J’arrive ! »

Le passage n’était pas très praticable, mais Orion parvint à son tour à s’y glisser sans trop de difficultés. Il n’était pas spécialement petit, mais il était fin et se faufiler dans des endroits étriqués ne lui posaient que rarement des soucis.
En dessous, il y avait moins de vent mais il faisait aussi plus frais - le soleil se trouvait caché par les planches du dessus et il régnait à l’intérieur même du bateau une odeur d’iode mélangée à celle du bois pourri. Couplée au clapotis des vagues, c’était loin d’être déplaisant, alors Orion se prépara à exclamer son enthousiasme quand... splat.
Une algue.
Sur sa tête.
Oh.

Il resta immobile un instant, tant par surprise que par réalisation : est-ce que Mars, son Mars et pas un autre venait de lui faire une blague ? Interdit, une algue verte et molle dans les cheveux, le trouva rien à répondre à son commentaire décontracté. Quand il reprit contact avec la réalité, Mars était déjà un peu plus loin et lui faisait dos. Alors Orion s’esclaffa. « Merci ! Ca me fait plaisir que tu ait pensé à moi, tu aurais pas dû. »
Puisqu’il s’agissait d’un cadeau de son très cher ami Mars, il garda l’algue sur la tête. Il avait décidé d’être gênant, quitte à sentir le varech.

Une porte se dressait dans le coin de la pièce, et pendant que l’Oublié semblait affairé à découvrir ce qu’il y avait dans le coin, Orion décida de poursuivre la visite. Algue-sur-tête, il essaya d’ouvrir la porte. Le battant en entier s’effondra en avant dans un fracas monstrueux. Après avoir fait le sursaut du siècle, il s’exclama un « MARS J’AI CASSE LA PORTE - » comme s’il s’agissait de quelque chose de grave.
Heureusement, aucune latte sous leur pieds ne céda. Plus de peur que de mal. « Oh il y a un couloir. Je vais voir. » Rapidement remis de ses émotions, comme s’il ne venait pas du tout de crier la seconde d’avant, il s’y engagea.


Se faisant la remarque comme quoi ce couloir ressemblait fortement à ceux des bateaux de Skyrim, il tomba sur un comptoir et plusieurs autres pièces. De sa maigre connaissance des bateaux, Orion savait qu’il y avait probablement une soute à l’étage du dessous, qu’elle était probablement noyée et qu’il y avait probablement les quartiers du capitaine quelque part, et c’était cet endroit qu’il souhaitait trouver.
Ses pas furent prudents alors que l’Astre se servait de sa main pour s’appuyer contre les murs fragiles, tentant d’appuyer le moins de poids possible sur le parquet. Quand il entendit les planches craquer doucement derrière lui, il savait que Mars le suivait.

« Je me demande à quoi ça ressemblait la piraterie ici. Tu crois qu’ils utilisaient les cristaux ? Imagine... le cristal de l’eau ou du vent. » En soi, c’était étrange de voir quelque chose d’aussi familier en Althea. « Les bateaux n’ont pas l’air si vieux que ça, en plus. » Pas comme certaines ruines. Pourtant, ici comme ailleurs, tout était vide de présence humaine.
C’est une question qu’Orion se posait souvent avec un petit frisson glacé. Qu’était-il arrivé aux anciens habitants ?
Il se retourna vers Mars, tout varech oublié. « Et puis des bateaux pour aller ou, si ce n’est autour d’Althea. Il y a bien la mer tout autour, c’est ça ? Comme un continent. Imagine s’il y en a d’autres ? » (Il avait toujours tendance à aller un peu trop loin - était-ce une hypothèse impossible pour autant ?) « Ce serait bien qu’on arrive à trouver une carte. Et pour ça, il faut qu’on trouve les appartements du capitaine. » Parce que c’est là que se trouvaient toutes les cartes de pirate, non ?

Le silence les suivait depuis quelques minutes déjà, ponctué par quelques grincements creux dans l’air tranquille. Mars l’avait dit - c’était étrangement vide.
Pourtant ce n’était pas les babioles qui manquaient. Quelques chopes en bois, ce qui ressemblait à un jeu de dé, des bouteilles vides et d’autres bricoles qui paraissaient appropriées pour un endroit de la sorte, mais il y avait quelque chose d’étrange. Peut-être était-ce l’odeur épaisse qui leur faisait un peu tourner la tête, ou peut-être était-ce autre chose, un sentiment un peu aérien qu’Orion, qui avait perdu sans s’en rendre compte son chapeau-varech, ne trouvait pas si désagréable. C’était vide de sons.« Peut-être qu’on va tomber sur le squelette du Capitaine Flint, » et après ces quelques mots prononcés qu’à peine leurs pas s’arrêtèrent sur une porte toute décorée.
Ce n’était pas d’un esprit royal mais il y avait quelque chose dans ces gravures, dans ces restes de peintures qui criaient « je dicte les ordres, ici » et la pièce qui se découvrit à eux ne faisait que renforcer cette idée.
A moitié enfoncé dans l’eau transparente, le sol avait un angle peu praticable. Orion resta un instant dans l’encadrement de la porte. Quelques lattes du plafond avait cédé et les rayons de l’après-midi coulaient depuis le pont jusque dans la petite marre qui se formait en contrebas, s’y reflétant calmement, projetant sur les murs une petite pluie de diamants liquides. Dans le chaos qui régnaient dans ces appartements, ça touchait presque à l’onirique. Une photo n’y rendrait pas justice.

Mars avait déjà fait quelques pas prudents et ce fut au tour d’Orion de le suivre. Tandis que son partenaire d’exploration s’en allait du côté du bureau renversé, l’Astre  lui se dirigea vers les placards taillés à même le mur. Certains avaient toujours des portes, d’autres non et Orion se dirigea vers ceux qui demeuraient entiers. Il fut obligé de forcer à chaque fois sur le bois déformé par les âges pour souvent se retrouver face au vide. Sauf pour le dernier placard.
Alors que Mars terminait de se battre avec le bureau, Orion essayait tant bien que mal d’attendre une étagère cassée d’où dépassait un cube en bois. Cube en bois qui, une fois dans ses mains, se révéla être une boite. La serrure en métal rouillé céda facilement à sa poigne. Il ne s’attendait pas à y trouver un éclat doré.
C’était logique, finalement. Ils étaient dans un bateau pirate donc les soutes avaient dû regorger de trésors. Peut-être l’équipage était-il morts avec, peut-être avaient-ils récupéré la cargaison, peut-être que d’autres étaient passés après eux, pourtant Mars et Orion avaient aujourd’hui de la chance.
Au creux de ses mains reposaient deux boucles d’oreilles qui avaient vu de meilleurs jours. Toutes en longueur, faites d’or et serties de petites pierres violettes, jouant parfois sur la transparence, la dernière partie de l’une d’elles manquait - pourtant elles restaient magnifiques et valaient toujours probablement quelque chose. Par chance, les papillons étaient toujours là. Et même si elles étaient sûrement destinées à une femme, Orion n’en eut pas grand chose à faire, brûla les embouts du bout des doigts et les accrocha à ses lobes. Il avait trouvé un trésor !

Il y eut du mouvement derrière lui : Mars avait trouvé quelque chose aussi. L’Oublié observait une petite sphère de métal décorée de tout plein de motifs étonnants. C’était fascinant. « J’hésite entre une clef de l’espace ou un presse-papier particulièrement fancy. Je peux ? »
Il s’était approché et avait levé la main vers l’objet et ses le prendre de la main de Mars, après avoir eu son accord, posa ses doigts dessus. « Ouvre-toi. » Un silence. « Active-toi ? » Rien ne se passa. Son anima ne pouvait rien faire. Il haussa les épaules et reculant un peu. «  Aucune idée de ce que c’est non plus. Et non, je vois que du papier trempé. Mais c’est pas grave, on a trouvé quelque chose ! »

S’éloignant de Mars, il refit le tour de la pièce. Chaque feuille avait perdu toute trace d’encre et semblait sur le point de craquer à la moindre pliure à cause du sel. Ce n’était pas aujourd’hui qu’ils trouveraient une carte et iraient visiter d’autres continents.
Ses pas le menèrent au fond de la pièce, là où l’eau clapotait doucement. En y trempant le bout des doigts, il sourit. Les rayons du soleil l’avaient rendue tiède. « J’aime bien cette pièce. »
Alors il resta là quelques instants, en silence. Tout était calme. Les remous qui couraient sur les flancs du bateau auraient pu le bercer et la lumière de la fin d’après-midi lui réchauffait les joues.
La lumière de la fin d’après-midi.
La lumière de la fin d’après-midi ?

« Attends. Attends attends attends. » Il se redressa tout d’un coup et chercha à toute vitesse dans ses poches. « Il est quelle heure là ? » Depuis combien de temps étaient-ils dans ce bateau ? Quelques heures ? « La marée, la marée ça en est où ? » Une fois son holokit trouvé, il navigua très vite jusqu’à l’application qu’il voulait. « Oh. Merde. » Il resta interdit quelques secondes avant de se tourner vers Mars. « Mars il faut qu’on remonte. »

C’est vraiment dommage, pensa Orion très fort et très spontanément avec une petite moue déçue en regardant le petit globe. Il aurait vraiment beaucoup aimé qu’il s’agisse d’une clef de l’espace. Mais Mars avait sûrement raison. Et puis vaisseau spatial ou non, il restait toujours très intrigué.
Le temps qu’il relève le regard, Mars avait pris ses aises. Il s’était appuyé sur le bureau délabré, la posture relâchée, le sourire tranquille. Il avait cet air olympien qu’Orion ne lui connaissait pas vraiment - et dans cette pièce, dans ces appartements délabrés aux peintures écaillées, il avait cette présence liquide qui se fondait si bien dans l’atmosphère. Pourtant, si le souffle de l’Astre s’arrêta net dans sa gorge, ce ne fut pas pour toutes ces raisons.
Ce n’était pas comme l’attaque - la farce - surprise de tout à l’heure. Mars avait amené sa main jusqu’à son visage, effleuré ses cheveux pour soulever le reste de plante aquatique qui trônait encore sur le sommet de son crâne ; il sursauta imperceptiblement et détesta tout de cette réaction. Ce n’était rien qu’une main dirigée vers son visage, innocemment proche de son crâne, de la racine de ses cheveux. C’était Mars, enfin. Il n’avait aucune raison d’avoir peur.
C’est que - c’était rare qu’il laisse quelqu’un toucher sa chevelure. Il n’y faisait pas particulièrement attention, mais - il les laissait pousser, parce qu’il le pouvait.
Et Mars n’avait rien fait de mal. Mars ne lui avait pas fait de mal. C’était idiot.

Il trouva ses yeux un instant, s’en détourna immédiatement. Ah, il y avait un drôle de conflit dans sa tête, un petit combat entre la partie de lui qui se sentait bête, si bête, et l’autre qui appréciait éhontément l’attention que l’on lui portait, tout à fait satisfait du regard appréciateur de son ami. « Je pense, oui. Elles me vont bien, tu trouves pas ? » Chassant les dernières bribes de fumée de son esprit, un brin de sourire pris place sur son visage, pas sans rappeler celui qu’arborait l’Oublié. Il le savait, qu’elles lui allaient bien.

La suite se déroula très vite - une réalisation, un juron, une remontée rapide vers la surface et surtout le constat qu’ils craignaient.
De la plage paradisiaque, il ne restait qu’un petit banc de sable toujours faiblement éclairé par les rayons de soleil oranges qui persistaient derrière l’horizon. Au dessus de leur têtes, le ciel s’assombrissait et soulignait la fraîcheur du vent qui n’avait plus rien pour le réchauffer. Ils étaient en février, après tout.

Orion poussa un long soupir. Ce n’était pas pour rien qu’il y avait des épaves partout ici, et ils s’étaient fait avoir comme des bleus.
A la question de Mars, il repris son téléphone, tout le dégoût du monde dans son geste. Qu’il était idiot d’avoir oublié ! Il ouvrit l’application et se contenta de lire les mots qui se trouvaient sur l’écran. « ‘La durée de chaque oscillation est d'un peu plus de 12 heures.’ Bah tiens. »
Il rangea son holokit bien au sec dans son sac à dos et se tourna vers le coucher de soleil. « Je sais pas si c’est très prudent de rester ici. C’est humide et on risque d’attraper froid. » Il suivit la direction que Mars pointait du doigt. « Bien vu ! On va peut-être pas mourir ici ! » Orion rit un peu en marchant vers la rambarde. Il ne pensait pas vraiment ses mots - il n’était pas du genre à être défaitiste, et quoiqu’il arrive ils n’allaient pas mourir s’ils restaient ici. Ce serait simplement... comme Mars l’avait dit : une belle soirée.
L’Astre sortit une lampe de poche de son sac. Le soleil baissait très vite. « Je crois qu’on peut passer par là, mais on va devoir faire attention. » Quelques rochers avant la tête hors de l’eau, et s’ils se débrouillaient bien, ils pourraient gagner une petite rampe qui serpentaient dans les rochers le long de la falaise. Le sol y était plat : il y avait eu du passage.
Avec un air particulièrement fin (non), Orion plissa les yeux en dirigeant la lampe de poche vers la falaise. « J’vois rien du tout, » fit-il plus pour lui-même qu’autre chose. « Plus qu’à aller v- »

Si Orion devait comparer ce qu’il venait de se passer à un autre événement, il aurait évoqué celui où il avait neigé particulièrement fort sur Paris. Evidemment elle n’avait pas tenu et rapidement, la capitale française s’était rapidement retrouvée envahie de nombre d’immenses flaques d’eau maronnasse. Orion s’en souviendrait toujours, de cet après-midi où il avait voulu traverser à Denfert, qu’un bus était passé un peu trop près du trottoir, avec roulé dans l’immense flaque et...

Le seul réconfort qu’il trouvait dans cette situation, c’était qu’il n’était pas seul. « Est-ce que c’est une BLAGUE ? »

Une grosse, jolie vague était entrée en collision avec le côté du bateau. Oh elle avait bien fait ton travail, elle avait fait un joli mouvement de balancier, et avait réussi à projeter de l’eau très haut ! Splendide !
Des pieds à la tête. Orion (et Mars aussi, sans nul doute) était trempé des pieds à la tête d’eau glacée. Même pour lui, c’était trop. « Je vais me jeter par dessus bord, Mars, » conclut-il dramatiquement en croisant les bras pour les frictionner.