« Aïe » fut la réponse instantanée face à la claque logée derrière sa tête. Pavel se tourna vers la jeune femme, un regard genre ‘mais pourquoi t’as fait ça’ peint sur ses traits ; attendant la justification à une telle violence. Et elle vint. Le Célestien arqua un sourcil sceptique, prenant une seconde ou deux pour fouiller dans sa mémoire. Toutefois, le jeune homme n’eut le temps de se justifier que Cybèle le somma d’avancer. Ah, et ainsi commença la torture ; sans même une minute de préparation mentale. Qu’elle était cruelle, Cybèle.

Pavel soupira lourdement avant de monter la première marche menant à une centaine d’autres. Ça lui arrivait d’être délusionnel, Pavel, mais il y avait certain sujet où il se montrait particulièrement censé, estimant ses propres capacités à leur juste valeur. Sa condition physique, par exemple. Il avançait aussi rapidement qu’il le pouvait, regard fixe sur la marche, puis la prochaine et celle d’après et c’était sans fin. Ce ne fût lorsqu’il entendu les bruits de pas de sa colocataire faisant demi-tour qu’il s’aperçu du faussé entre leur capacité physique respective.

« Je-je ne sais pas ce qu’il m’a pris » confessa-t-il, haletant et aveugle face à l’agacement palpable de la jeune femme, trop centré sur sa respiration décousue. « Ah… je ne me pensais pas suicidaire… »

Au départ, il ne comprend pas ce qu’elle cherche à faire, ce n’est que lorsqu’elle lui ordonne de grimper qu’il saisit. Ses yeux s’écartillent en réponse. No way. Malheureusement, Cybèle ne lui laissa guère le choix de rétorquer qu’elle le tira vers elle, forçant le mouvement.  « Tu réalises que c’est extrêmement embarrassant ? » dit-il, sécurisant sa position en laçant ses bras autour du cou de la jeune femme. Néanmoins… elle lui évitait une mort soudaine. Mais c’était embarrassant, très embarrassant.

Au moins, se consola-t-il, il n’y avait pas de témoins.
Ses espoirs furent fracassés à la vue d’une jeune femme.

Entraîné dans un chaînon d’événements absurdes malgré lui, Pavel n’eut qu’une option : se fermer la gueule et suivre. Il ne sut trop pourquoi, mais ils se retrouvèrent dans une salle, confortablement assies avec des victuailles devant eux. Pour la deuxième fois de la journée, Pavel arqua à nouveau un sourcil. Comment se faisait-il que les sièges du CRP soient plus confortables que celles du Ministère ? Il en était presque indigné. Il écoutait sans vraiment écouter sa collègue, se disant qu’elle avait les choses en main et que, de toute façon, s’il daignait ouvrir la bouche et ‘fuck’ leur plan, elle le tuerait.

Donc, sa main s’allongea, s’apprêtant à attraper une viennoiserie jusqu’à ce que CutieMakeup prononce son faux-nom.

« Hein ? » Il eut l’air largué avant de comprendre qu’elle se foutait de sa gueule. À regret, il retira sa main. « Ah, oui, régime… »

Ses yeux roulèrent face au payback de la jeune femme.

« Tout à fait, Cutie, c’est ce que la charmante hôtesse nous a dit. » Il se leva, tentant d’être tout sourire. « C’est le genre d’exclusivité que notre fanbase souhaite voir. Puis, je pense que ça pourrait être également bénéfique pour votre organisation : la visibilité. Impressionnés, les fans seraient probablement plus disposer à venir bosser pour vous. »

Quoique légèrement crispé, son sourire s’élargit d’avantage.

« Puis, Cutie est, totalement, la plus grosse nerd. Ever. En ce qui concerne l’informatique. Vous réaliseriez un de ses plus gros fantasmes. »

[ hrp : essaie de ne pas mettre de bâton dans le roues de cybèle. toutefois, il l'aide à convaincre moira de les laisser visiter la salle avec des arguments totalement convaincants. ]

Contrairement à tes coéquipiers du jour, tu étais parfaitement au fait de ta position au sein du CRP et des avantages dont tu pouvais, de temps en temps, profiter. Passer cette hôtesse d’accueil n’avait nullement été source de pression ou d’angoisse pour toi, à vrai dire, peu de choses étaient capables de te faire suer. Tu parvenais bien souvent à maintenir à état d’esprit clairvoyant et sain, à rester analytique et pragmatique, parce que c’était bien là le meilleur moyen de se sortir d’une problématique insolvable. Clipsant ton l’attache de ton badge numérique sur ton haut, tu avanças le plus naturellement du monde vers les ascenseurs, ramenant tes mains dans tes poches en ouvrant la marche.

Même si le premier problème qui s’était dressé face à vous avait été d’une facilité déconcertante à surmonter, tu n’en demeurais pas moins sur ta faim quant à votre préparation. Il y avait certains détails à revoir, notamment la façon dont vous alliez vous organiser à partir de maintenant. Les ascenseurs étaient très probablement équipés de caméras et de micros, impossible donc d’y concocter un schéma d’action sans que tôt ou tard, ces faits ne soient découverts. D’un autre côté, votre destination se trouvait au douzième étage de cette grande tour, vous étiez censé être un groupe d’intervention du CRP, difficile pour vous de justifier le choix des escaliers qui s’avérerait bien plus loin et bien plus suspect.

Trop de réflexions, tu t’y étais embourbé et, en un clignement de paupière, la réalité t’avait rattrapé. Cela t’arrivait parfois, de réfléchir tellement intensément que tu ne te rendais même plus compte de ce que tu pouvais faire ou de ce que le monde autour de toi produisait. Ainsi, tu te retrouvais au milieu de l’élévateur et les mots de Pavel vinrent t’extirper totalement de ton état de torpeur. Pas le temps de réagir, pas le temps de t’y opposer, les deux étaient déjà partis. Tu grimaças, puis soupiras de manière parfaitement audible. Tu n’avais confiance en personne à l’heure actuelle et pourtant, tu dépendais de chacun d’eux d’une façon ou d’une autre. C’était bien pour cela que tu appréciais contrôler les choses, être capable de les diriger et de les influencer. Avec ce choix de séparation improvisé, vous vous retrouviez livrer à vous-même, ce qui en soit n’était pas un réel problème, tu étais capable de t’assumer, mais tu doutais pleinement de la capacité de Cybèle et Pavel à s’en sortir sans encombre. Après tout, personne ne savait ce qui vous attendait réellement dans ce bâtiment de malheur.

Tu t’étais réembarqué dans d’innombrables calculs. Comment faire pour les récupérer au plus vite ? Comment faire pour minimiser les risques d’être repérés en maximisant vos chances de réussite ? Comment faire pour le groupe ne prenne plus de décisions à la hâte ? Comment faire pour que… Stop. D’une certaine façon, Raziel t’avait ramené à la raison. Tu n’avais pas le contrôle sur la situation extérieure, cela ne servait donc à rien de te prendre la tête avec ça. Une fois encore tu soupiras, non pas vis-à-vis, au contraire, mais le timing était plutôt mauvais. Tu pivotas légèrement, tournant la tête vers ton acolyte du jour et récupérant l’un des sachets qu’il te tendait. « Merci… » Tu finis même par lui accorder un sourire. « Enchanté ! » Au moins, lui était toujours là et pouvait être une aide vitale. « Désolé, je réfléchissais un peu trop férocement. » Tu plongeas dans le paquet pour ingurgiter ton premier bonbon. Mine de rien, tu restais un adolescent qui raffolait des sucreries. « T’en fais pas, on va sortir d’ici rapidement et totalement indemnes, tu peux me faire confiance. » Parfois, il suffisait d’un ton un peu rassurant et du bon choix de mots pour faire de quelqu’un d’anxieux un atout précieux.

Plus vite que prévu, l’ascenseur s’immobilisa avant de révéler un spectacle imprévu, totalement imprévu. Ramenant tes prunelles vers les portes s’ouvrant, tu y découvris Kazuki, ton supérieur direct et presque tuteur au sein du CRP. Les choses se gâtaient. Si l’excuse utilisant le CRP en justificatif pouvait marcher avec l’intégralité de Polaris, il demeurait une exception, une seule et il s’agissait de Kazuki. Enfin, tu devais rester lucide. Après tout, Kazuki n’était pas au courant d’exactement tout, lui-même était très occupé et tu pouvais bien te justifier d’une façon ou d’une autre, le tout était de rester convainquant, comme d’habitude.

« Évidemment, quand t’es pas au CRP les autres refusent les tâches chiantes et c’est moi qui dois me déplacer. Je t’avais dit de me nommer vice-directeur. » Une insolence maîtrisée, peut-être même plus de l’audace qu’autre chose. « Un bonbon ? » En lui présentant ton paquet encore bien rempli. Mais Kazuki étant Kazuki, te connaissant presque aussi bien que ton propre père, il t’était bien difficile de passer entre les mailles de son filet. Alors que l’élévateur se bloquait, ton supérieur hiérarchique vint révéler une information de poids qui avait été jusqu’ici omise et qui te plaçait désormais dans une bien fâcheuse position. Raziel n’était pas d’ici et malheureusement, tu n’avais pas eu de temps pour élaborer une réponse bien construite… « Raziel. Il s’appelle Raziel. » Inutile de mentir, surtout pas à Kazuki et surtout pas sur le nom d’un individu. Encore fallait-il que Raziel lui-même ne t’ait pas menti. « C’est toi qui me rabâches de fréquenter des gens de mon âge de temps en temps et puis il se balade toujours avec des bonbons, donc je l’aime bien. Ne t’inquiète pas, ça ne m’empêchera pas de travailler correctement, après tout, je suis un petit génie, n’est-ce pas ? » C’était laborieux, mais possiblement persuasif.

« Une nouvelle machine ? » Étrange que cette dernière n’ait pas fait parler d’elle directement au sein du centre de recherche, mais après tout, vous n’aviez pas le monopole de l’inventivité. Pas de réponses et pire, voilà que tu te retrouvais au onzième étage, à l’extérieur de l’ascenseur. « Eh ? Quoi ? » L’appareil commençait déjà à refermer ses portes… « ÇA COMPTERA COMME HEURES SUPP’ ! » M’enfin, mine de rien, ton patron venait de carrément t’arranger, là.

Avant de poursuivre, tu avais besoin de mettre les choses au clair. Te retournant vers Raziel, tu patientas quelques instants, la porte dans ton dos ne risquait pas de s’envoler de toute façon. Discrètement, tu t’approchas d’un pas, arborant une voix audible pour Raziel, mais te préservant des oreilles indiscrètes si tant est qu’il y en ait. « Caer ou Vallée ? » C’était important. Kazuki venait de prouver que Polaris était parfaitement renseigné, si tu étais celui qui possédait le moins d’informations, alors tu devenais celui qui se terrait dans la position faible et ça, c’était inimaginable. « Et puis, pourquoi tenter tout ça si tu n’es pas directement concerné ? Si Kazuki est au courant, d’autres gens le seront. On ne peut pas s’en remettre à l’improvisation continuellement. Je ne suis ni de la police, ni de l’armée et pour ce soir, on est dans le même camp, donc on va devoir se faire un minimum confiance. » Tu ne voulais pas apparaître comme un ennemi, ce n’était pas ton intention du tout. Mais la réalité était défavorable à l’étranger… « Celestia est isolationniste, si je n’ai pas toutes les informations, je ne peux pas te protéger correctement et si un étranger se fait attraper et est mêlé à une telle opération… Tu finiras en prison à coup sûr. »

Le reste dépendait du jeune homme, à lui de voir s’il souhaitait t’en dire plus ou non. Tu avais fait ta part en lui tendant une main amicale, si cette dernière n’était pas prise, alors tu passerais cette porte sans réellement te soucier des conséquences qui pourraient s’abattre sur les frêles épaules de ton accompagnant. La balle était dans son camp.  

HRP → Akira se retrouve dans l’ascenseur avec Raziel, une petite discussion s'engage, mais ils sont interrompus par Kazuki. Petit échange entre le maître et son élève qui tente de garder la face pour ne pas éveiller les soupçons. Puis, une fois dégagé sur le pallier du 11ème étage, Akira prend à part Raziel pour lui poser quelques questions, histoire d'avoir toutes les cartes en main pour la suite.  

Ce n’était que par pure fierté que Pavel se retint de se laisser choir telle une baleine sur la rive suite à l’ascension du Mont Everest. Dos courbé, mains sur ses genoux et haletant sa vie, il se laissa quelques seconde pour récupérer son souffre avant de porter son regard vers les deux nouveaux influenceurs. Décidément! Si au départ, il avait pensé que Moira devait revoir la prescription de ses lunettes (parce que, clairement, elle ne voyait pas bien, le comparer à un influenceur? Quelle blague!) et que parallèlement, ses standards en terme d’actorship devait être bas (très bas même), il ne put s’empêcher de lui attribuer quelques crédits à la vue des deux nouveaux influenceurs.

Ironiquement, c’était bien eux qui pouvaient pull off le look d’influenceur. Akira, le cosplayer tout droit sortie du jardin et Raziel… Et bien, juste un regard et on comprenait qu’il faisait dans le kawaii avec son look de poupée pastelle.

Puis, ç’aurait été une belle couverture, vraiment, mais à force de rajouter couche par-dessus couche, le mensonge s’épaissit et devient inévitablement plus décelable. Déjà que le rouquin craignait de tomber nez-à-nez avec le vrai WorldVlog et sa CutieMakeup, parce qu’assurément, oui, ils étaient dans l’établissement. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’ils se pointent et foutent tout en l’air.

Mais bon, un simple scan visuel du couloir leur indiquait qu’il se trouvait effectivement sur le bon étage. La suite logique des choses était de se débarrasser pacifiquement de Moira.

« Eux? Mais non! » dit-il l’air faussement indigné à la remarque de leur accompagnatrice. « Regardez bien très chère. » Il pointa dédaigneusement le duo, se vomissant un peu dans la bouche, par le fait même. « Ils ne sont ni lit, ni hype et leurs habits pourraient être yeet dans la poubelle la plus proche. »

Il lui vomit tous les memes de 2019 dont il se souvenait à la figure; incertain de leur signification ni si l’usage employé convenait. Mais, vous savez quoi? Moira avait prouvé qu’elle n’était pas le crayon le plus aiguisé de la boîte en croyant dur comme fer qu’un homme d’affaire en complet était influenceur, alors so what. Néanmoins, Pavel avait envie d’en finir le plus rapidement et ne plus jamais reparler de cet épisode déprimant de sa vie.

« Vous savez quoi? » poursuivit-il dans cette voix désinvolte et incroyablement fake. « J’ai perdu intérêt; si Cutie veut poursuivre, alors bien à elle. »

Il fit une pause dramatique pour camoufler sa réelle envie de vomir. Et appuya sur le bouton de l’ascenseur, parce que fuck les escaliers.

« Vous et moi, et moi et vous, on va aller faire une reprise techno vraiment trop in de me and the boyz. Parce que, le futur, c’est le passé, go retro! »

L’ascenseur s’ouvrit, il poussa Moira dedans et la suivit avant de cringe intérieurement et d’adresser un au revoir, un signe de la main à l’appui :

« Bye fam. »

Dans la tranquillité, il pourrait probablement user de son don.

[ hrp : pavel distrait Moira en l'amenant dans l'ascenseur. ]