Impossible de rester sans rien faire après un refus de merguez, je mis de côté ma douleur et je cherchai activement la solution à tous les problèmes : ma nouvelle merguez vegan aux haricots rouges, paprika, ail et persil. Généralement je les formais avec du plastique puis je l’enlevais pour avoir la forme d’une saucisse mais dernièrement j’ai décidé de le laisser pour simuler une sensation de boyau vegan.

Une fois le mets repéré j’attendais que le végétarien finisse son discours. Il ne faut jamais interrompre un client lorsqu'il parle, une compréhension mutuelle doit avoir lieu pour que l’amour des merguez puisse être partagé.

Bien que je ne comprenais rien à ses histoires de tapisseries et de cristaux, je fis la même chose qu’avec mes clients qui me parlaient d’astrophysiques et de chipolata, je hochais la tête en disant par ci et par là “Je vois” ou “Je suis d’accord”.

Une fois la discussion finie, je sortis précipitamment la merguez. “Celle ci est végan !” Dis-je en lançant un regard menaçant vers Félix pour qu’ille ne dégrade pas mon image et celle de mon beau pays d’Espagne. “Pour le humble prix de 24,99 !” ajoutai-je en haussant les sourcils et tentant d’inclure du regard la personne qui me croyait fou.

Félix pose les bonnes questions et tu te retrouves à acquiescer distraitement en attendant la réponse de Donovan. Ça ne t’aide toujours pas à comprendre l’utilité de votre présence ici, parce que le chef de la Vallée semble déjà avoir les cartes en main. Il se permet même un commentaire qui te fait rouler des yeux. Il doit te prendre pour une idiote, c’est un peu insultant en fait, mais tu ne réponds rien. Parce qu’il ne ferait qu’ajouter quelque chose de peux pertinent, encore. « Vous l’avez laissé devenir fou dans la jungle. » Bon ça c’est aussi en partie de votre faute, t’en es bien consciente. Vous l’avez trouvé dans un sale état et vous n’avez pas pu l’aider, mais du lot, t’estimes que celui qui l’a laissé pourrir là est bien plus coupable. « Comment a-t-il guéri d’ailleurs, la relique ? » Tu ne t’attends pas à une réponse, t’en as pas vraiment eu de franches depuis le début.

De toute façon, monsieur le chef estime que vous pouvez passer à autre chose. Tu ne comprends pas pourquoi t’as été mis sur cette mission, n’aurais-tu pas été plus utile avec Raeb à chercher la relique ? « Vous savez que je ne suis pas une garde du corps ou les muscles de service ? » Le commentaire ne servira probablement à rien, surtout connaissant l’attitude du dirigeant, mais tu les protégerais quand même. Parce que tu ne peux pas t’en empêcher, parce que t’es attachée à Félix. « Restez sur vos gardes, on ne sait pas si le Maitre des Rêves nous paiera pas une autre visite. » Ou si Donovan vous planterait un couteau dans le dos, rendu là, tu n’écartes rien. Mais tu sors la première, sortant ton arme et faisant apparaitre un clone pour fermer la marche.

“... Et une merguez aux cafards ?”
La conversation devenait de plus en plus incompréhensible, sans mes merguez comme soutien moral je serais sûrement déjà devenu dingue comme eux et j’aurais commencé à parler de “maîtres des rêves”, de “sauveurs de l’humanité” et qui sait quelles autres balivernes, des pouvoirs magiques peut-être ?

“En parlant de pouvoir, je pourrais utiliser ma capacité de persuasion pour vendre mes merguez et obtenir la relique…”
Tandis que je songeais à cette possibilité et que je m'occupais à mettre une des tapisseries dans mon sac à merguez, le groupe commençait à migrer.

“Attendez j’arrive.” J’allais les rejoindre puis, avant même de pouvoir proposer une autre merguez, je vis la personne dont le nom pénétra enfin mes tympans, Jill, se dupliquer.

“J’ai vraiment pris trop d’herbe à chat...” je les suivais en silence tout en me frottant les yeux.

Tu retiens l’argument qui te monte à la gorge lorsque Donovan rejette la faute sur Raeb pour ce qui s’est passé à Perdition. T’as envie de le mettre face à ce que tu as pu appris à savoir qu’il n’a pas cherché Raeb la première fois, qu’il n’a semblé motivé à le récupérer que lorsque la relique était en jeu. Ça ne servirait à rien de toute façon, t’as bien compris que Donovan n’admettrait jamais être dans le tord. Ça ne t’empêche certainement pas te rouler des yeux à ce qu’il dit par la suite. Ça explique certes pourquoi il se tourne vers toi maintenant, mais ça n’explique pas ta présence dès le départ. T’as l’air de quelqu’un qui passe son temps à regarder des vieilles tapisseries ? Tu te fiches bien qu’il ait confiance en toi, mais qu’il vous ordonne ainsi te laisse un goût amer. « Si vous étiez un leader digne de ce nom, vous n’auriez pas à nous l’ordonner. » T’apprécies pas qu’il te traite comme un laquais. T’es peut-être sa subordonnée, mais qu’il le remette sous le nez après avoir indiqué avoir confiance en vous.

Mais qu’importe, parce que s’en suit un commentaire philosophique sur les dieux. Tu serais tentée de faire remarquer que si un ou des dieux existaient là-haut vous ne seriez pas tombée dans un enfer. Ça ne te concerne pas, tu regardes Félix du coin de l’oeil, curieuse de ce qu’ille aurait à dire sur la question. Tu redresses la tête lorsque Donovan évoque le maitre. « Le Maitre des rêves ? » Vous allez affronter des maitres des rêves ? « Vous amenez des civil‧e‧s avec nous ? » Tu sais que Félix peut se débrouiller en cas de besoin, tu l’as vu‧e à l’oeuvre, mais Mariano et son erreur administrative… Enfin, t’imagines que c’est pour ça que t’es là. Tu augmentes ton don de métal, resserrant du même coup ta poigne sur ton arme avant de laisser ton clone s’approcher de Félix pour augmenter un de ses dons. Quitte à devoir faire avec des civils, autant te tourner vers la seule personne en qui tu as confiance. Et tu regrettes définitivement l’absence de Mackenzie.

“C’est compréhensible” répondis-je sans rien écouter aux nombreux sujets de conversation de mes compagnons.

“Et bien, ce sont des clients difficiles” je regardai l’intérieur de mon sac, toutes mes vingt merguez ainsi que la tapisserie y étaient, “Cette journée de vente est un échec…” traversa mes pensées mais je ne perdais pas complètement espoir.

Mon incompréhension fut visible une fois arrivé au pont suspendu, je regardais dans tous les sens me demandant pourquoi nous étions là quand certains mots de la conversation firent surface “Erreurs administratives… Confiance en vous…”. Je compris vite que notre employeur s'était trompé de route et qu’il avait confiance en moi pour retrouver le chemin.

“Allons, faisons demi-tour on a rien à faire ici” dis-je en voyant que notre équipe se préparait à braver le danger. Je regardais Félix et Jill “On ne va tout de même pas risquer nos vies pour une simple erreur qu’on a même pas fait, on a un autre chemin à suivre”